Le site internet du Saint Monastère d’Optina propose une bibliothèque en ligne fournie. On y trouve de nombreux ouvrages des startsy d’Optina et des recueils de leurs lettres et homélies. Parmi ces ouvrages on compte le recueil des lettres écrites par le Saint Starets et Confesseur de la foi Nikon d’Optina, dont le journal fait l’objet d’une traduction depuis des mois sur le présent blogue. Nous proposons ici la traduction du recueil de ces lettres de Saint Nikon. Il ne s’agit plus du Novice Nicolas, auteur du journal précité, mais déjà du Hiéromoine Nikon, qui a intégré et mis en pratique dans son podvig les enseignements de son starets Saint Barsanuphe d’Optina, héritier de la tradition du Désert d’Optina.
Annexe 4e : Extrait de la Philocalie : Du changement et de l’aliénation pour chacun et de la gloire éminente de l’humilité.
Certains pieux ascètes souhaitaient toujours bénéficier de la paix de l’âme. Mais ce n’était pas le cas ; par moments, ils ressentaient dans leur âme la paix et le calme, et à d’autres moments s’élevaient diverses tempêtes de pensées inutiles, bien sûr, sans qu’ils ne favorisent cela, ils en devenaient fortement troublés et en désespéraient même de leur salut. Mais il ne convient pas du tout de se troubler dans pareils cas, car le trouble indique l’incompréhension de la vie spirituelle. Pour éclaircir ce sujet, j’introduis ici les paroles adressées par les Saints Pères Calliste, Patriarche de Constantinople et son compagnon d’ascèse Ignace Xantopoulos à quelques pèlerins. Voici ce qu’ils dirent :
«Nous voulons que tu saches aussi cela, comme ceux qui, par la purification et l’illumination, ont atteint le parfait autant qu’il est possible de l’atteindre. Car il n’est pas de perfection parfaite dans le siècle imparfait., mais bien plutôt, l’accomplissement n’y a pas de fin. Même de tels hommes ne portent pas toujours en eux l’immuable, à cause de la faiblesse naturelle et de la présomption qui s’insinue parfois. Il leur arrive, pour en être éprouvés, de souffrir les aliénations, les captivités. Celles-ci appellent alors de plus grands secours.
Ce qui est contraire aux parfaits, les Pères le nomment la part des loups. Car l’immobilité, l’immutabilité, sont gardées telles quelles dans le siècle à venir. Mais dans le siècle présent, c’est tantôt le temps de la pureté, de la paix, de la consolation divine, tantôt le temps de la confusion, de la tempête, de la tristesse. Et ceci à la mesure de la vie et du progrès de chacun, selon les jugements que le Seigneur sait, et bien sûr, pour qu’à travers eux nous reconnaissions notre faiblesse. Car il est dit : «Bienheureux celui qui connaît sa propre faiblesse » et suivant Paul : «Ne nous confions pas en nous-mêmes, mais en celui qui ressuscite les morts» (2Cor.1,9).
Ainsi revenons continuellement à Dieu dans l’humilité, le repentir, la confession. Saint Isaac dit : «Combien de fois certains transgressent et guérissent leurs âmes dans le repentir, et à chaque fois, la grâce les reçoit. Car en toute nature douée de raison, le changement survient indéfiniment et les altérations assaillent tout homme à tout moment de sa vie. Celui qui est doué de discernement comprend le sens de tant de vicissitudes. Mais surtout les épreuves qu’il vit chaque jour peuvent lui en donner l’expérience, s’il est sobre et vigilant. Alors il se gardera ainsi recueilli en son intelligence. Il apprendra quelles variations de douceur et de bienveillance subit sa réflexion chaque jour et comment elle passe d’un seul coup de la paix au trouble, alors qu’il n’y est pour rien, et comment il se trouve en grand et indicible danger. C’est ce que le Bienheureux Macaire a voulu montrer avec beaucoup de prescience et d’attention, pour la mémoire et l’attention des frères, en écrivant de «ne pas tomber dans le désespoir quand les choses contraires nous forcent à changer, car il arrive toujours de tomber à ceux qui se tiennent dans l’ordre de la pureté, et sans qu’ils aient été eux-mêmes négligents ou dissolus, de même qu’il arrive que l’air devienne froid. C’est justement, en effet, quand ils marchent selon leur ordre qu’il leur advient de tomber en heurtant des choses contraires au but de leur volonté». Et plus loin : «Qu’en est-il donc au juste ? Les changements, dit-il,viennent en chacun comme change l’air.»
Comprends ce que veut dire «en chacun». Car la nature aussi est une. Mais afin que tu ne penses pas qu’il a dit cela pour les seuls hommes les plus bas et les moins avancés, et que les parfaits sont délivrés du changement et se tiennent toujours inflexiblement dans un même ordre, sans pensées passionnées, comme disent aussi les euchites, il a donc mis : en chacun. Comment donc cela est-il possible, ô Bienheureux ? Mais tu le dis toi-même : il fait froid, et peu après viennent la chaleur, peut-être la grêle, et ensuite le calme. Il en va de même dans l’exercice de notre vie. La guerre et le secours de la grâce se succèdent. Un temps, l’âme traverse l’hiver, de dures vagues l’assaillent. Et de nouveau, c’est le changement. La grâce visite et comble son cœur de la joie et de la paix qui viennent de Dieu, et de pensées chastes et paisibles.»
Il déclare qu’ici les pensées sont chastes, laissant entendre qu’avant cela elles étaient bestiales et impures. Et il exhorte : «si donc après ces pensées chastes et douces suit une agression, ne nous affligeons pas, ne désespérons pas. Même au moment du repos que donne la grâce, ne nous glorifions pas encore, mais au temps de la joie, attendons-nous aux tourments.» Il ajoute : «Sache que tous les saints sont passés par cette œuvre. Dès lors que nous sommes en ce monde, l’immense consolation qui est au milieu d’eux nous est donnée dans le secret, car chaque jour et à toute heure nous est demandée la preuve de notre amour pour Dieu dans l’effort, dans le combat contre les tentations. Et telle est cette preuve : ne jamais nous affliger, ne jamais nous laisser abattre dans le combat. Ainsi nous allons sur la voie droite. Mais celui qui veut changer de chemin, ou s’en détourner, devient la part des loups.»
Ô miracle ! Comment le saint, en si peu de mots, a su confirmer un mode de vie, lui donner tout son sens, et entièrement enlever le doute de l’intelligence du lecteur. Celui-là, dit-il, qui se détourne du chemin et devient la part des loups, veut marcher sur ce qui n’est pas la voie. C’est cela qu’il s’est mis dans l’esprit d’acquérir : il veut aller sur un chemin à lui, qui n’a pas été tracé par les Pères.
Et peu après : «L’humilité, même sans les œuvres, efface nombre de fautes. Au contraire, les œuvres sans elle ne servent à rien.» Et aussitôt : «Ce que le sel est à la nourriture, l’humilité l’est à toute vertu. Elle peut briser la force de beaucoup de péchés. Il faut donc continuellement peiner en esprit pour elle, dans la modestie et dans l’épreuve du discernement. Si nous l’acquérons, elle fait de nous des fils de Dieu. Et sans même les œuvres bonnes, elle nous mène devant Dieu. Car sans elle, toutes nos œuvres, toutes les vertus et toutes les peines sont vaines. Dieu veut donc le changement dans l’intelligence.» Et : «Dans l’intelligence nous devenons meilleurs. Il suffit qu’elle-même, sans autre aide, se tienne seule devant Dieu et parle pour nous.» Il dit encore : «L’un des saints a dit : Quand te vient la pensée d’orgueil qui te dit : souviens-toi de tes vertus, dis : ‘Vieillard, vois ta prostitution’».
[N.d.T. :Cette version française est extraite de La Philocalie des Pères Neptiques, Tome second. Ed.Desclée De Brouwer. Traduction Jacques Touraille.Pages 590 à 592.]
Annexe 5e : Lettre, datée du 15/28 novembre 1922, adressée par Saint Nikon à sa mère (Voir la deuxième lettre de la présente traduction)
(A suivre)
Traduit du russe
Source 
Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.