Le site internet du Saint Monastère d’Optina propose une bibliothèque en ligne fournie. On y trouve de nombreux ouvrages des startsy d’Optina et des recueils de leurs lettres et homélies. Parmi ces ouvrages on compte le recueil des lettres écrites par le Saint Starets et Confesseur de la foi Nikon d’Optina, dont le journal fait l’objet d’une traduction depuis des mois sur le présent blogue. Nous proposons ici la traduction du recueil de ces lettres de Saint Nikon. Il ne s’agit plus du Novice Nicolas, auteur du journal précité, mais déjà du Hiéromoine Nikon, qui a intégré et mis en pratique dans son podvig les enseignements de son starets Saint Barsanuphe d’Optina, héritier de la tradition du Désert d’Optina.

A Lydia Mejekova
Mademoiselle Lydia, bien-aimée de Dieu !
Paix à toi, et bénédictions de Dieu. J’ai reçu ta lettre et je me hâte de te répondre par le premier courrier. Bien que tout ce qui est arrivé soit très affligeant, il ne faut pas désespérer. «Le Seigneur est mon secours et je mépriserai mes ennemis» (Ps. 117,7). Dans les prochains jours je répondrai à toute ta lettre, maintenant, je suis disposé à répondre uniquement à la première question, la principale.
Attends la visiteuse et, aussi brièvement et calmement que possible, dis que tu es surprise par de telles questions, car tu as écrit tout ce qui devait être clarifié, et n’as pas l’intention de rendre d’autres comptes de tes actes. Bien que ce soit difficile, rassemble ton courage et dis-le, afin qu’il soit clair que tu ne souhaites pas poursuivre d’autres relations à l’avenir. N’offense personne avec tes mots, répond de manière plus évasive lorsque tu es interrogée.
Quant à la question du confesseur, dis que tu es allée auprès du Starets Nectaire, quand et pourquoi, il vaut mieux ne pas l’expliquer. Dis aussi à ta sœur Valentine que nous avons parlé. Tu peux dire qu’en plus des paroles oiseuses, tu as eu plusieurs autres occasions de te convaincre de certains faits qui t’incitent à te taire.
Que le Seigneur vienne à ton aide, te raisonne, t’affermisse. Aujourd’hui, j’ai célébré la liturgie et j’ai prié particulièrement pour toi, afin que le Seigneur t’aide, et moi aussi, dans cette affaire. Que le Seigneur te garde.
Le pécheur Hiéromoine Nikon
Kozelsk
21 juillet / 3 août 1924.
A Lydia Mejekova
Mademoiselle Lydia, bien-aimée de Dieu !
Paix à toi et bénédictions de Dieu. A ta première question, j’ai déjà répondu, bien que je l’aie fait à la hâte car je ne voulais pas manquer le train postal. Je compatis de tout cœur avec toi, mon enfant. Que notre Seigneur t’aide.
La deuxième question est aussi très importante. Je comprends parfaitement ce que tu m’écris au sujet des conditions de vie à Kalouga et à Kozelsk. Tu a déjà d’une certaine manière commencé à me parler de cela, mais je ne me souviens plus à quelle conclusion nous étions arrivés.
Je vais te dire franchement que j’étais accablé par une vie si étouffante, principalement à cause de la présence des gens, par l’absence d’un coin à moi ; bien sûr, le désagrément causé par certains fut aussi un fardeau. D’autres circonstances, une autre décoration des pièces, d’autres dimensions et ce genre d’éléments, devraient éviter d’attirer l’attention sur soi de cette manière. Je suis sûr que si on était dans une masure sordide, mais si on bénéficiait de la possibilité de s’isoler, d’avoir chacun sa chambre, on serait tout à fait satisfait d’un tel environnement. Mais le luxe, bien que relatif, et d’autres besoins, on peut les multiplier à l’infini. Il vaut mieux éviter cela, ne pas s’y accrocher avec son cœur, afin que celui-ci soit libre, pour que rien ne l’empêche d’appartenir au Seigneur, que rien ne le détourne du Seigneur. Il me semble qu’il serait possible de trouver une issue à cette situation en changeant de lieu à Kozelsk, mais cela coûterait plus cher. Si tu te souviens, je t’ai dit dès le début que je ne résoudrais pas cette affaire d’un coup, que je te bénissais d’essayer de vivre et de faire l’expérience, et alors nous verrons. Maintenant, moi, je te dis ceci : ne romps pas complètement avec tes proches à Kalouga, et ne retourne pas à Kozelsk. Vis jusqu’à l’automne, et ensuite on verra. En ce qui te concerne, on peut ajouter divers détails à cela. Que le Seigneur t’éclaire et te fortifie. Viens vers la Lumière, mon enfant, passe et ne compte pour rien tous les obstacles et tentations qui viennent du monde, de la chair et du malin. Que le Seigneur soit ton Aide. Le Seigneur aide toujours ceux qui avancent sincèrement vers Lui : et ce qui n’est pas possible pour l’homme est possible pour Dieu.
Pour la réalisation de la commande concernant les archives, je suis reconnaissant. Que le Seigneur te sauve! S’ils ne peuvent pas donner de récompense, elle n’est pas nécessaire ; nous ferons sans.
Dans l’histoire avec l’école, que le Seigneur t’aide.
La question de l’irritation liée au voyage à Kozelsk semble avoir disparu, mais je dirai quand même quelques mots. L’exemple du Père Archimandrite Moïse (et non Xénophon) n’est pas approprié ici. Il y avait de la colère, justifiée, je pense, en grande partie, contre les diverses faiblesses des gens, car c’était la colère du dirigeant, du supérieur, contre ses subordonnés, face à leurs actes, et il ne pouvait y avoir d’envie, alors que dans le présent cas c’est de l’envie, et je te le dis : injustifiée. Mis à part l’exemple du Père Archimandrite Moïse, j’aurais pu admettre l’attente de quelques jours à Kalouga, comme mesure temporaire, mais je n’approuve pas cela en son fondement, car il n’y a pas de place pour l’envie ici. Que Dieu vous vienne en aide.
Prie chaque jour, matin et soir, pour ceux envers lesquels tu nourris des sentiments injustes afin qu’au lieu de cette mauvaise disposition s’installe en toi envers eux le pur amour en Christ, car il faut aimer son prochain en Christ et pour le Christ. Mais les passions dans notre nature déchue sont tenaces, nous devons les combattre, c’est-à-dire faire l’effort de ne pas y succomber ; la victoire sur elles est atteinte par la puissance de Dieu, notre faible force n’est pas suffisante pour cela. Il faut l’admettre humblement et, par l’humilité, attirer à soi la miséricorde et l’aide de Dieu. Et quiconque n’en est pas encore pleinement conscient, et ne s’est pas totalement humilié, est souvent amené à endurer la violence des passions, afin de se faire humble. C’est pourquoi je te le demande sincèrement : fais-toi humble à la fois devant les gens et au plus profond de ton cœur, afin que l’humilité soit pleinement sincère, sans hypocrisie.
Je te souhaite sincèrement toutes les miséricordes de Dieu. Et à ta sœur Valentine, les bénédictions de Dieu. Si certains disent du mal de mon nom et m’accusent de l’une ou l’autre chose, c’est bien. Souviens-toi qu’il est dit dans l’Évangile : «Malheur à celui dont tous les hommes disent du bien» (Lc. 6,26). Si ces louanges de tous sont appelées malheur dans l’Évangile, alors c’est vraiment un malheur. Que le Seigneur te sauve par les jugements qu’Il sait. Que le Seigneur te protège de tout mal.
Le pécheur Hiéromoine Nikon
Kozelsk
23 juillet / 5 août 1924
(A suivre)
Traduit du russe
Source

Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.