Le site Pemptousia, lié au Saint et Grand Monastère de Vatopedi, avait mis en ligne dans ses pages russes une série de quatre textes, intitulés «La Nature de l’Église», du Saint Geronda Joseph de Vatopedi, Père spirituel de la communauté de ce monastère et fils spirituel du Saint Geronda Joseph l’Hésychaste. Très récemment, la section russe du site a été supprimée sans explication. Heureusement, ces textes avaient été repris entretemps par le site Odigitria.by. Il s’agit d’extraits du livre “De la Mort à la Vie”. Voici la quatrième et dernière partie. Les autres se trouvent ici.
La mission de l’Église consiste à enseigner à notre peuple les vertus divino-humaines que nous avons rappelées, et de tisser en son âme l’étoffe de toutes les qualités divines, car le commandement du Seigneur est : «Devenez saints comme Je suis saint» (1Pi.1,16). Les Chrétiens ont une responsabilité. En celle-ci s’intègre le sauvetage de son âme du monde du péché envahi par le mal. A l’athéisme cultivé et dissimulé, cannibalisme poli de la culture contemporaine, nous devons opposer les Christophores qui, par la douceur de l’Image selon laquelle ils furent créés et par l’imitation séculaire des amis du Christ, ont vaincu le monde. Et en vérité, la victoire qui triomphe du monde, c’est notre foi (1J.5,4).
Puisque le but divino-humain de l’Église est éternel et immuable, le moyen d’atteindre ce but est aussi immuable, illuminé par la lumière du Seigneur, qui est Le même, hier, aujourd’hui, et dans les siècles (Hb.13,8). Et c’est le moment de se rappeler de la différence entre les laïcs et les véritables moines chrétiens orthodoxes. Ce qui est du monde et de l’homme est limité et éphémère, alors que tout ce qui est en Christ est immuable et éternel. L’Orthodoxie, en tant qu’unique porteuse et protectrice de la parfaite et lumineuse Personne divino-humaine du Christ, est mise en œuvre exclusivement par des moyens divino-humains, les saintes vertus, et non par les moyens empruntés par les catholiques romains et les protestants, qui conviennent seulement au fier humaniste européen et absolument pas à l’humble Christ Divino-humain.
Posons-nous la question : «Avec quels moyens notre Seigneur Jésus Christ affronta-t-Il le prince des ténèbres quand, après Son baptême, Il se retira en haut de la montagne?» Notre Seigneur et Maître de notre salut, souhaitant nous enseigner à lutter contre le principe et les pouvoirs des ténèbres et contre le péché en général, fit, du jeûne et de la prière, de remarquables armes et moyens de lutte pour le combat invisible. Depuis lors, notre nature est devenue vainqueur du mal et de satan lui-même, car nos armes, comme le dit Saint Paul, «ne sont pas charnelles; mais elles sont puissantes, par la vertu de Dieu, pour renverser des forteresses» (2Cor.10,4).
Toute l’histoire de notre Église Christophore et porteuse de l’Esprit regorge de héros, de saints ascètes, de héros de l’ascète, qui révélèrent en eux le visage du Christ et combattirent avec succès de multiples péchés et le diable lui-même. Ils furent puissant dans cette guerre et mirent en déroute des régiments d’ennemis, et ils reçurent la promesse et pénétrèrent en vainqueurs en leur intérieur le plus secret, au-delà du voile, où les avait précédés, pour ne plus en ressortir, Dieu le Verbe, notre Seigneur Jésus Christ, et devinrent des exemples d’ascèse et de vie juste.
Notre homme intérieur, créé à l’image de Dieu, tombe, se flétrit, se dessèche et petit à petit, se meurt de tout le mal et de tout le péché, de tout ce qui est démoniaque.
Pour échapper à cette influence et ne pas mourir en esprit, l’homme doit en permanence cultiver la foi de l’Évangile et préserver les vertus christophores, que le Seigneur Lui-même lui a remises :le jeûne et la prière. Ainsi, il fortifiera son âme, sa conscience et sa volonté, car «Tout est possible à celui qui croit»(Mc.9,23). Acquérons cette force divine toujours invincible dont parle Saint Paul : «Au reste, fortifiez-vous dans le Seigneur, et par sa force toute-puissante»(Eph.6,10). Si dans ce monde où réside le diable, quelqu’un veut devenir vainqueur, il doit aspirer à l’esprit du Christ, renforcer sa vie évangélique dans le Seigneur et dans la puissance de Ses muscles «fortifiés à tous égards par sa puissance glorieuse» (Col1,11), «en sorte que Christ habite dans vos cœurs par la foi»(Eph.3,17).
Le Mystère du Christ se dévoile dans l’esprit de l’homme seulement en l’Esprit Saint. C’est une immuable règle de la connaissance du Christ. Ce mystère éternel, très pur et très saint, l’Évangile du Christ et de Son Église fut atteint par le grandiose Apôtre Paul, et d’autres de ses compagnons d’ascèse et de lutte, dans des visions miraculeuses, afin de vous les dévoiler à tous «et de mettre en lumière quelle est la dispensation du mystère caché de tout temps en Dieu qui a créé toutes choses,» (Eph.3,9) par Jésus Christ, afin que nous sachions «quelle est la glorieuse richesse de ce mystère parmi les païens, à savoir: Christ en vous, l’espérance de la gloire»(Col,27).
Finalement, Saint Paul, ayant atteint l’esprit de Dieu, prédit : «Dieu nous ouvre une porte pour la parole, en sorte que je puisse annoncer le mystère de Christ, pour lequel je suis dans les chaînes» (Col.4,3). «Il n’a pas été manifesté aux fils des hommes dans les autres générations, comme il a été révélé maintenant par l’Esprit aux saints apôtres et prophètes de Christ. Ce mystère, c’est que les païens sont cohéritiers, forment un même corps, et participent à la même promesse en Jésus-Christ, par l’Évangile, dont j’ai été fait ministre selon le don de la grâce de Dieu, qui m’a été accordée par l’efficacité de sa puissance». (Eph.3,5-7)
Traduit du russe.
Source.
Pour que notre Église locale soit synodale, il convient de mettre fidèlement en œuvre les méthodes inhérentes à la divino-humanité: les vertus et les labeurs divins. Comme les saints apôtres les utilisaient toujours, après les avoir reçus du Seigneur, et à leur suite, leurs héritiers, les grands héros christophores de l’ascèse. Leurs vertus divino-humaines étaient organiquement liées et interdépendantes; quand une vertu en engendrait une autre, elles se renforçaient mutuellement. Lorsque se manifestent les impulsions du vieil homme, modèle de l’homme terrestre, ces passions destructrices, les mauvais raisonnements, et les perversions, alors, les fidèles doivent opposer à ces commandements viciés du péché, la masse des vertus créées par l’image de l’homme céleste, ce modèle authentique dont nous sommes revêtus. La première de nos responsabilités, les responsabilités des êtres pareils à Dieu, est la foi en Christ, une foi sans retenue ni compromis. Si nous nous en tenons à cette foi avec l’abnégation qui l’accompagne, cela signifie que nous servons le Christ, nous Le vénérons, nous L’aimons pour tout ce qui arrive en notre vie. La vertu divino-humaine suivante, dans le contexte de nos obligations, est la prière et le jeûne. Cette vertu doit faire partie du mode de vie des Orthodoxes, de la vie dans toutes ses manifestations, pour devenir l’âme de son âme, car elle unit directement avec le Christ Sauveur, Qui le jura Lui-même : Je ne veux pas la mort du pécheur, mais que le pécheur se détourne de sa voie et qu’il vive (Ez.33,11). Jeûne et prière doivent être accomplis non par chacun isolément, mais en l’Église; ils doivent s’accomplir en tous. Jeûne et prière, en effet, ne constituaient-ils pas l’exigence principale requise par Dieu de la part de nos ancêtres, lorsqu’Il les appelait au repentir ? Ne s’agissait-il pas là de manifestations actives du repentir? Ne furent-ils pas mis en œuvre en toutes les périodes de l’histoire par les héros de l’ascèse qui s’efforçaient de restaurer leur lien avec Dieu qu’ils servaient?
Une autre vertu conciliaire, sceau de la vérité chrétienne, est l’amour. Cette vertu divino-humaine est accessible en tous temps, à tous. Elle ne connaît ni frontière ni mesure, elle est plutôt une expiration d’une caractéristique divino-humaine, car Dieu Lui-même est et Se nomme amour, et même ‘tout-amour’. Il est pareil à la lumière du soleil qui se déverse sur tous sans discrimination. Le Dieu Très Bon prend soin de nous tous et nous fait tous bénéficier de Sa bonté, y compris les pécheurs, même s’Il préfère le juste, selon la loi de la similarité. Il convient de faire croître cet amour divino-humain dans notre nature ; il se distinguera de tout autre amour, de ce que nous nommons amour, de l’amour relatif, de l’amour égoïste et de l’amour du gain. L’amour du christ embrasse toujours tous, il est toujours désintéressé, toujours il donne, jamais il ne reçoit ni ne demande. Dans son hymne merveilleuse, Paul le Théophore chante les louanges de l’amour comme personne, car personne ne vécut l’expérience de cette vertu dans toute sa plénitude comme il le fit.
Par le mystère de l’économie divine, Dieu le Verbe nous ouvrit la voie vers la Divinité Trine. Dans ce mystère divino-humain, dans lequel fut accomplie l’économie divine, tout vient à exister et à être «du Père, à travers le Fils, dans l’Esprit-Saint». Voilà la loi primordiale du corps divino-humain de l’Église, le but suprême tant de sa vie que de la vie de chacun de ses membres, et par conséquent, vie authentique et salut, sont la vie dans la Sainte Trinité, notre Dieu un. Cela fut incarné dans l’Église, Corps du Christ, par la crucifixion, la Résurrection et l’Ascension de notre Seigneur. Au moyen de sa grâce, le Seigneur transfigure l’homme ancien en homme nouveau, lui donne la force pour la vie nouvelle.
L’Église en tant qu’hypostase du Dieu-Homme, le Christ, est un organisme divino-humain, et pas une institution humaine. L’Église est indivisible comme la Personne de son Fondateur, comme Son Corps. C’est pourquoi nous répétons que la division de l’Église, organisme divino-humain insécable en petites organisations nationales, est une erreur immense. Et nous, les Athonites, en cette dernière heure, alors que les fondements de la vie sociale sont ébranlés, demandons à la hiérarchie de cesser de servir l’idée de nationalisme (car ce sont eux, nos pasteurs), et de devenir les militants authentiques de l’Église Une, Sainte, Catholique et Apostolique (A suivre)
C’est uniquement dans le Christ que notre nature passe du temporel à l’éternel; elle ne se sent plus mortelle mais immortelle, non pas divisée et limitée dans le temps, mais entière et éternelle. L’Église est l’hypostase éternellement vivante du Christ l’Homme-Dieu, Son hypostase, dans le présent et dans l’éternité, l’hypostase divino-humaine, l’esprit et le corps divino-humains. La définition de l’Église, sa vie, son but, son esprit, ses principes, ses méthodes, tout ce qui la constitue, lui est donné par le Christ Dieu-Homme.