Dans le texte mis en ligne le 15 janvier 2014 dans sa version russe sur le site Pravoslavie.ru, le Métropolite Athanasios de Limassol transmet, à travers des exemples tirés de sa vie, de son expérience, un long enseignement au sujet de l’importance de la prière, et surtout de la prière pour autrui. Compte tenu de la longueur de la version russe, la traduction française est proposée en quatre parties.

Personne ne peut imaginer pouvoir vivre sa vie sans devoir traverser des difficultés. Qui que nous soyons, saints ou pécheurs, nous allons au devant d’épreuves. Telle est la nature de notre vie, telle est notre vie. L’affliction en fait partie. Et Dieu n’en est bien entendu pas coupable; Il ne nous envoie pas l’affliction pour nous tenter, comme l’imaginent beaucoup de gens dans leur simplicité. «Dieu nous a envoyé le malheur et les difficultés pour nous tenter!». Comme si Dieu ne savait pas si notre foi est forte ou faible, et qu’Il voulait nous «cuisiner» un peu afin de comprendre qui nous sommes réellement. Dieu ne nous tente pas en ce sens. Et lorsque nous disons, «Je suis en pleine tentation», cela signifie «Je m’améliore». La tentation me rend meilleur; «éprouvé par la tentation» signifie «expérimenté».

(Photo Pravoslavie.ru)

La nature de notre vie est telle car la maladie, l’affliction, la souffrance et la mort sont entrées en l’homme après sa chute dans le péché. La mort elle-même est une chose effroyable pour l’homme, elle ne nous plaît pas car elle ne fait pas partie de notre nature. Nous n’avons pas été créés pour mourir et nous ne voulons pas la mort. Mais elle est, et elle restera, jusqu’à ce que Dieu l’anéantisse définitivement lors de Sa Seconde Parousie, au dernier jour. Et jusqu’à ce moment, nous tous, sans exceptions, demeurerons soumis à la corruption et à la mort.
Le temps qui s’écoule jour après jour, qu’est-ce, sinon la mort? Nous avons commencé cet entretien à 7h30. Il est 7h35 ; cinq minutes se sont écoulées. Ces cinq minutes sont retirées de notre vie, jamais elles ne reviendront. Nous sommes cinq minutes plus vieux, plus âgés, plus décrépis. C’est ainsi. Approfondissant notre réflexion, nous nous demandons Qui peut nous donner la solution, Qui peut nous libérer de cette réalité qui nous est naturellement lourde et qui nous pousse au désespoir? Le Christ. Il peut nous donner la réponse dans la mesure où Lui seul a vaincu la mort et donne à l’homme la possibilité de la dépasser. Comment? Par Sa Résurrection, Sa Venue, par l’anticipation de Son Règne.
Il est merveilleux de voir comment l’homme se sent fort et puissant dans les épreuves, du fait de la grâce de Dieu. J’ai rendu visite à toutes les familles éprouvées par la catastrophe aérienne de 2005 (Un avion cypriote s’est alors écrasé près d’Athènes et 121 hommes et femmes perdirent la vie). J’ai constaté que quasiment toutes les familles étaient fortes. Dans ces moments terribles, ces gens allaient littéralement puiser en eux-mêmes la consolation divine, et ils tenaient le coup. J’ai rencontré deux familles à Paralimni, une ville de Chypre. Les deux femmes m’impressionnèrent fortement. Elles avaient perdu chacune cinq membres de leur famille, leur père, leur mère et leurs trois enfants. Ces femmes produisirent sur moi une impression extraordinaire. C’était de simples femmes ; elles me dirent qu’elles étaient analphabètes. Disons plutôt qu’elles avaient peu d’instruction. Mais quelle puissance et quelle sagesse en elles! Et au lieu que ce soit moi qui les console, elles finirent elles-mêmes par me consoler! Cela me marqua profondément. J’étais accompagné par un prêtre australien. Je l’avais emmené afin qu’il ne restât pas seul. Avant de partir, il m’avait demandé, le pauvre :
– Qu’allons-nous donc dire à ces gens? Comment allons-nous les consoler?
Et quand nous repartîmes, il me dit :
– Nous sommes venus pour les consoler, et c’est nous qui avons reçu la consolation !
Il en fut ainsi car ces gens avaient un énorme trésor de patience, de force, et ils louaient Dieu tout en acceptant l’épreuve dans laquelle ils se trouvaient.
Autrement dit, la question essentielle est : ‘Comment recevons-nous les difficultés? ’. Personne n’imagine ne jamais en avoir. Nous devons y être prêts et nous devons savoir que nous allons devoir en traverser tout au long de notre vie. Car cela fait partie de la vie des fidèles et des athées, des jeunes et des vieux, des riches et des pauvres, des saints et des pécheurs. Tous, sans exception, nous y sommes soumis. ‘Comment l’homme dépasse-t-il la difficulté?’; c’est là que réside l’essentiel. Si nous apprenons à la rencontrer avec patience, force, prière et espoir en Dieu, alors notre difficulté se transformera pour nous en consolation. Alors, nous ne coulerons pas, nous continuerons notre navigation, les ténèbres n’assaillirons pas notre âme et la douce lumière du Christ brillera toujours dans notre existence, car là où se trouve Dieu, tout est saturé de consolation et d’amour. Le Christ est la clé. Il est très important de la comprendre : serions-nous même en enfer, si le Christ est avec nous, l’enfer devient paradis. Et arriverions-nous au paradis, si le Christ n’est pas avec nous, le paradis deviendra un enfer, car Il est tout pour nous, Il est la Lumière du monde, la Vie du monde.

Lorsque nous sommes assaillis par les difficultés, ou quand nous voyons quelqu’un dans une situation pénible, il convient de réagir de façon très attentive. Nous devons avant tout prier pour nos frères qui sont dans l’affliction. Savez-vous qu’il est très important de prier pour ceux et celles qui sont dans le besoin et les difficultés? La prière pour autrui a une signification gigantesque et une grande puissance. Dès que nous entendons que quelqu’un souffre, qu’il vit des problèmes, des difficultés, même si notre prière ne compte que deux mots, elle a une grande force. En effet, c’est ainsi que nous apprenons à aimer nos frères, et ensemble, nous nous renforçons les uns les autres et nous comprenons que nous ne sommes pas des individus confinés en eux-mêmes comme dans des coquilles et pensant «C’est une bonne chose que ce mal ne se soit pas abattu sur ma maison, que je n’aie pas à en souffrir, ni mes proches, ni mes connaissance, ni les gens de ma ville, ni ceux de mon pays…». Quel que soit l’endroit où se déchaîne le mal, nous sommes tous frères, nous sommes un seul corps, et quand nous prions pour nos frères dans l’affliction, éprouvés par la douleur, la tentation et les souffrances, nous apprenons réellement à accueillir les autres comme nos frères et sœurs, et à voir tous les gens comme notre famille, comme un seul Corps. Parce qu’il en est réellement ainsi, nous sommes les fils et les filles d’Adam et de Dieu. Nous sommes tous frères par la chair dans la mesure où nous provenons du même Dieu et des mêmes ancêtres, Adam et Eve, et nous sommes tous appelés à entrer dans le Royaume de Dieu. (A suivre)

Traduit du russe
Source

P.S. Celles et ceux qui souhaitent approfondir le sujet de la prière consulteront avec bénéfice le blog de Maxime, qui lui est dédié, ainsi que ces pages du Journal d’un Chrétien Ordinaire, ou encore cette page du blog Orthodoxologie