Né en 1888, le Saint Hiéromartyr Nikon (Beliaev) fut hiéromoine à la Skite du Monastère d’Optina. Il en fut un des derniers startsy, ayant eu pour père spirituel Saint Barsanuphe, lui-même fils spirituel du Saint Starets Anatole (Zertsalov) d’Optina. Un récit de sa vie a été traduit en plusieurs parties sur le présent blogue et est accessible ici. Le Monastère a publié le journal tenu par le novice Nicolas pendant les trois premières années de sa vie monastique. (Дневник послушника Николая Беляева (преподобного Оптинского старца Никона). Le texte ci-dessous est la traduction (sur base de l’édition de 2016) des premières pages de cet ouvrage remarquable, inédit en français. Le début de la traduction se trouve ici.
(…) Je continuai mon chemin, devant l’église je fis une grande métanie. J’avançai encore et je rencontrai le Père Nectaire devant son bâtiment, ainsi que le Père Ioann, le sacristain. Ils me félicitèrent tous les deux très chaleureusement, mais je ne me souviens pas de leurs paroles. Finalement, j’entrai dans ma cellule. Avec des grandes et des petites métanies, je remerciai le Créateur pour Sa miséricorde envers moi. Il était déjà deux heures, je partis à l’église pour les vêpres. A l’entrée de l’église, le premier à me féliciter fut le Frère Mikhaïl Ejov. Pendant les vêpres, j’ai lu l’Épître aux Corinthiens, péricope 125. «En effet, la doctrine de la croix est une folie pour ceux qui périssent ; mais pour nous qui sommes sauvés, elle est une force divine» (1Cor.1,18). Après la fin des vêpres, je rentrai dans ma cellule, enlevait rason et kamilavka, et puis me rendis auprès de Batiouchka.
Jeudi 29 avril, de la semaine de Thomas
De par notre faiblesse, nous nous assîmes à table et reprîmes des forces avec du thé ou de l’eau chaude, du pain, des concombres et du chou. Bientôt, je me retrouvai seul avec Batiouchka. Nous avons parlé du rasophorat.
– Une chose merveilleuse, Batiouchka, dis-je, c’est que vous m’avez indiqué la signification de ce que je me trouvais derrière le Père George, et j’ai été libéré du service militaire le jour de la fête du Saint Mégalomartyr Georges le Victorieux (le 3 novembre).
– Croyez-moi, dit Batiouchka, cela, je ne le savais pas. Cela signifie, qu’il devait en être ainsi. Avec votre libération du service militaire, vous avez, pourrait-on dire, fini de servir le monde, pour vous vouer au service de Dieu. Je vous ai dit plus d’une fois que j’attachais une grande importance à ce que vous avez été libéré du service militaire…
– Puis, Batiouchka, mon attention a été attirée sur cette autre chose: le premier qui me félicita après le Père Archimandrite, fut le Frère Ignace. Et je suis revêtu de la soutane depuis le jour de la fête de Saint Ignace le Théophore (le 29 janvier).
– Oui, et c’est remarquable, bien que vous n’avez fait qu’effleurer un petit peu, d’un doigt, la Prière de Jésus, et vous voyez, Saint Ignace le Théophore veille déjà sur vous, vous êtes déjà à sa charge… Nous ne pouvons pénétrer le sens intérieur des événements par notre propre force, c’est un don d’en haut, vous ne pouvez rien obtenir de vous-même ici. Si vous continuez dans cette voie, c’est-à-dire la compréhension du sens intérieur des événements de la vie en disant la Prière de Jésus, alors vous verrez de plus grandes choses que celle-là, comme le Seigneur l’a dit à Nathanaël (J.1,50)…
– Comme ce que j’ai dit?
– Oui. A vrai dire, j’avais complètement oublié ça. Bien sûr, une grâce particulière agit maintenant sur vous… Alors continuez le chemin de la Prière de Jésus… Je Vous ai déjà dit que le monachisme est externe et interne. Vous ne pouvez pas ignorer l’extérieur, mais vous ne pouvez pas en être satisfait. L’extérieur sans l’intérieur cause même du mal.
Le monachisme extérieur peut être assimilé au labour de la terre. Peu importe le nombre de sillons, vous ne ferez rien pousser si vous ne semez pas. C’est le monachisme intérieur qui est le semis, et le grain est la Prière de Jésus. La Prière de Jésus sanctifie toute la vie intérieure du moine, lui donne la force dans la lutte, en particulier elle est nécessaire pour supporter les afflictions et des tentations…
Je ne me souviens de rien de plus maintenant. Je pense que tout l’essentiel a été noté, mais dans les détails, selon toute vraisemblance, beaucoup a été omis.
L’oukase de Son Éminence portant l’autorisation de ma tonsure de rasophore est daté du 3 avril. J’ai regardé quand il a été apporté à Batiouchka. Ensuite, voici encore autre chose. Le Saint et Grand Samedi, avant les Matines Lumineuses, j’étais assis près de Batiouchka sur une chaise. Voici qu’il me dit:
– Vous avez peut-être remarqué que je suis devenu plus strict avec vous maintenant. Quand j’ai été tonsuré rasophore, Batiouchka Anatole m’a dit un jour ceci : «Maintenant, une nouvelle vie commence pour vous. Et la direction et l’humeur qu’adopte le moine dans les premiers temps après la tonsure de rasophore, elles demeureront en lui jusqu’à la tombe».
– Ah bon, c’est comme ça, dis-je, parce que je pensais que la vraie vie monastique commençait avec la tonsure à la mantia…
– Oui, le moment de la tonsure de rasophore est d’une grande importance dans la vie du moine. Par conséquent, vous devez maintenant être particulièrement attentif à vous-même et abandonner complètement la tendance à l’humour. C’est ce que je vous dis…
Samedi 1er mai de la semaine de Thomas
Hier, nous avons fait les vigiles chez Batiouchka. Aujourd’hui, je suis allé à la première liturgie au monastère, et maintenant je viens de revenir de la procession au puits Saint Paphnuce. Après la procession, je suis allé boire le thé dans la cellule du Père Archimandrite, comme on le fait d’habitude.
Il fait merveilleux. Tout est dans la joie. Il n’y a pas de nuage dans le ciel. Les arbres fruitiers sont en pleine floraison, comme s’ils étaient saupoudrés. C’est très beau. La Skite est tout simplement un paradis. Quelle beauté!
Dimanche 2 mai, des Myrrhophores
La journée s’est passée tranquillement. J’ai lu Saint Marc l’Ascète. Hier, je suis arrivé aux vigiles pour l’hexapsalme, je m’étais attardé chez Batiouchka. Quand je suis sorti de chez lui, c’était une belle nuit. La lune, bien qu”encore fine, brillait dans le ciel de façon assez lumineuse… C’était beau.
Tout le monde parle de la comète, mais je ne l’ai pas encore vue, et je n’ai entendu personne qui l’ait vue parmi les résidents de la Skite.
Ivanouchka a décidé d’écrire des poèmes ces derniers jours.
Il dit que Batiouchka l’a béni. aujourd’hui, il m’a donné un de ses poèmes «Sur les ruines des églises», bien sûr, pas réelles, mais spirituelles. (A suivre)
Traduit du russe
Source :
Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.