Né en 1888, le Saint Hiéromartyr Nikon (Beliaev) fut hiéromoine à la Skite du Monastère d’Optina. Il en fut un des derniers startsy, ayant eu pour père spirituel Saint Barsanuphe, lui-même fils spirituel du Saint Starets Anatole (Zertsalov) d’Optina. Un récit de sa vie a été traduit en plusieurs parties sur le présent blogue et est accessible ici. Le Monastère a publié le journal tenu par le novice Nicolas pendant les trois premières années de sa vie monastique. (Дневник послушника Николая Беляева (преподобного Оптинского старца Никона). Le texte ci-dessous est la traduction (sur base de l’édition de 2016) des premières pages de cet ouvrage remarquable, inédit en français. Le début de la traduction se trouve ici.
Troisième Cahier
Au Nom du Père et du fils et du Saint-Esprit, Amen.
Seigneur, bénis !
1910 (Suite)
Vendredi 18 juin, Carême des Saints Apôtres
Nous nous préparons tous. Aujourd’hui, le Seigneur m’a jugé digne de me confesser. Et le matin, je suis allé à la Litugie au monastère pour recevoir l’eau Sainte de la Théophanie. C’est la première fois que je me confesse en tant que rasophore.
Après le déjeuner, Batiouchka m’a donné son journal et nous avons lu ensemble les notes des 18, 19 et 20 juin 1897. Après avoir reçu un bain spirituel, je suis allé après-midi, par faiblesse, au bain physique.
Samedi 19 juin
Aujourd’hui, le Seigneur m’a jugé digne de recevoir les Saints Mystères du Christ. Avant le repas, j’ai lu pour Batiouchka un passage du livre «Sur les Monts du Caucase», au sujet du troisième niveau de la Prière de Jésus. J’ai pris le journal de Batiouchka.
Je me sens fatigué physiquement, surtout dans les jambes, mais mon âme est calme. Gloire à Dieu. Batiouchka m’a dit aujourd’hui que le Seigneur m’avait envoyé la maladie aux jambes par amour pour moi.
Dimanche 20 juin
Je me suis levé assez facilement pour la liturgie, bien que quinze minutes plus tard que d’habitude, c’est-à-dire à six heures et quart. Hier, avant les complies, j’ai lu un peu le journal de Batiouchka. Je pense à le lire attentivement, car c’est la représentation de la vie et des actes de Batiouchka, qui sont très importants pour moi.
Depuis que Batiouchka m’a béni de dire la Prière de Jésus pendant les offices, ceux-ci ne se font pas plus pesants pour moi et peuvent devenir pour moi des aides à l’apprentissage de la Prière de Jésus, selon les parole de Saint Seraphim de Sarov ou de l’Évêque Ignace, je ne me souviens pas bien.
Après la liturgie, j’ai bu le thé chez Batiouchka, puis j’ai écrit une lettre d’urgence et j’ai mangé du caviar. Seigneur, sauve Batiouchka!
Puis de deux heures et demies à quatre heures, j’ai marché dans la forêt. Bien sûr, avec la bénédiction de Batiouchka. Je marchais seul, disant la Prière de Jésus. Rien de spécial ne s’est passé chemin faisant, du moins, jusqu’à ce que je rencontre un petit serpent et en sois un peu effrayé, je l’ai contourné. Quel serpent c’était, je ne sais pas, mais je n’en ai pas vraiment rencontré beaucoup.
Maintenant, j’ai marché un peu dans la Skite avec Batiouchka. Il fait merveilleux. Tout est calme dans l’âme. Gloire à Dieu. Ce qui est nécessaire c’est de révéler pensées et actes. J’en vois clairement la nécessité, en fait.
Le 22 juin
Aujourd’hui, Batiouchka m’a dit:
– Que le Seigneur me donne de vivre encore jusqu’à votre mantia, afin que vous soyez fortifiés dans l’esprit. Il y a la mantia matérielle et la mantia spirituelle. Il faut, bien sûr, se renforcer en esprit.
– Mais en quoi consiste ce renforcement dans l’esprit? Ai-je demandé.
– Dans le renoncement à soi. Dans le renoncement à soi par amour pour le Seigneur Jésus-Christ. Dans le renoncement à tout, quoi que ce soit. Pour l’amour du Seigneur. C’est une conception très complexe de la vie spirituelle…
Aujourd’hui, Batiouchka était présent aux matines et pour la règle. Pour les prières de Batiouchka, je me lève plus facilement le matin et en général je sors du sommeil plus facilement.
Mercredi 23 juin
Hier, je suis allé aux vigiles avec Batiouchka, pour la seconde partie. Quand nous sommes rentrés à la Skite, Batiouchka m’a dit qu’il avait entendu parler de deux décès dûs au choléra à Pryski. J’avais déjà entendu dire que le choléra était à Kiev. Que Dieu ait pitié de nous!
Je suis allé à la liturgie. Il était difficile pour moi de me tenir debout à cause de ma maladie aux jambes, si bien que je n’ai pu le supporter et je me suis déplacé du milieu de l’église vers le mur et je me suis appuyé contre celui-ci
En attendant Batiouchka, je me suis assis dans la salle de prière, j’ai lu un peu l’Évêque Ignace. Un vrai trésor que ses écrits! Et j’aime tant les lire.
Dimanche 27 juin
Le vingt-quatre, pour la fête de la dédicace, le Père Archimandrite a célébré chez nous. Depuis déjà quelques semaines, j’ai remarqué à mon pied gauche une sorte d’irruption cutanée. Je l’a frottée un peu, mais comme cela me préoccupait, j’ai reçu la bénédiction de Batiouchka pour aller à l’infirmerie. Il s’est avéré que c’était de l’eczéma. Le Père Panteleimon m’a bandé la pied en appliquant des onguents sur la zone douloureuse. En outre, il a trouvé que j’avais une forte dilatation des veines et m’a conseillé de bander la jambe. Dans le même temps, un novice du monastère est arrivé à l’infirmerie, à qui le Père Panteleimon a donné l’ordre de désinfecter les latrines en raison de l’apparition du choléra à certains endroits, car il y a déjà un décret du gouverneur.
Je suis allé boire le thé de la communauté sous les cèdres. Hier, je suis à nouveau allé à l’infirmerie pour un pansement. Je suis allé aux vigiles avec Batiouchka, pour la deuxième moitié, à savoir lors de la lecture du cathisme.
Dernièrement, j’ai remarqué que les cinq cents sont apaisants pour l’âme.
Un jour, je me suis levé pour réciter le cinq cents, mécontenté par de quelque chose, une sorte de murmure, un jugement et une auto-justification inséparable de ce dernier. Quand j’ai eu fini, j’ai senti une certaine fatigue dans le corps suite aux métanies, mais dans l’âme, un apaisement.
Je ne me souviens pas où j’ai lu que pour réussir dans la vie spirituelle, et en particulier dans la Prière de Jésus, il est nécessaire d’endurer patiemment toutes sortes d’afflictions, d’insultes, d’humiliations et surtout de calomnies. Je l’ai lu, je me souviens, mais il est très difficile de le faire. Je me suis habitué à l’auto-justification même quand je suis coupable, et quand vous sentez et voyez que c’est vous qui avez raison, il est très difficile d’éliminer l’orgueil et l’auto-justification. (A suivre)
Traduit du russe
Source : 
Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.