Journal du novice Nicolas (Saint Nikon) d’Optina (95)

Né en 1888, le Saint Hiéromartyr Nikon (Beliaev) fut hiéromoine à la Skite du Monastère d’Optina. Il en fut un des derniers startsy, ayant eu pour père spirituel Saint Barsanuphe, lui-même fils spirituel du Saint Starets Anatole (Zertsalov) d’Optina. Un récit de sa vie a été traduit en plusieurs parties sur le présent blogue et est accessible ici. Le Monastère a publié le journal tenu par le novice Nicolas pendant les trois premières années de sa vie monastique. (Дневник послушника Николая Беляева (преподобного Оптинского старца Никона). Le texte ci-dessous est la traduction (sur base de l’édition de 2016) des premières pages de cet ouvrage remarquable, inédit en français. Le début de la traduction se trouve ici.

(…) Pour autant que je me souvienne, le dix-neuf, j’ai vu, assis dans ma cellule, qu’un arbre tombait. J’ai commencé à regarder attentivement et j’ai constaté que cet arbre était attaché à une corde tirée par l’auxiliaire du père économe et des ouvriers. C’est comme si la fièvre montait en moi; je venais d’entendre le matin Batiouchka affirmer : «Pendant que je suis à la Skite, je ne permettrai pas que l’on coupe fût-ce une seule branche».
J’ai donc pensé que cela se faisait à l’insu de Batiouchka. Et ce, d’autant plus que Batiouchka m’avait parlé de ces arbres, en été lors d’une promenade en soirée. «Ici, il y a deux ou trois arbres (des tilleuls). Peu de temps avant mon arrivée, Batiouchka Ambroise, pointant vers ces arbres (alors il y en avait beaucoup ici, tout un bosquet), ordonna de les préserver, disant: «Le maître viendra et vivra ici, et dans ce bosquet il boira le thé…» Peu de temps plus tard, je suis arrivé, et j’ai été placé justement dans ce bâtiment, et j’aurais probablement pris le thé dans le bosquet, mais ils avaient presque tout coupé; il restait ces deux ou trois arbres… (C’est derrière le côté Sud de la nouvelle église entre les deux bâtiments)». Et voilà que je voyais qu’on abattait ces arbres; maintenant, il n’en restait plus un seul là-bas. Je suis allé le dire à Batiouchka. L’ayant appris, Batiouchka appela l’auxiliaire du père économe et le réprimanda, il lui ôta son rason et lui ordonna de faire des grandes métanies dans le réfectoire. Batiouchka m’a couvert, mais ils devineront toujours que c’est moi qui l’ai dit. Peut-être que je devrais endurer des afflictions à cause de cela, mais je ne pouvais pas me taire. Que la volonté de Dieu soit faite en toutes choses!..
Quand j’étais dans le magasin, pour y acheter de l’huile, il y avait là Dariouchka, qui avait été tonsurée par le Père Ambroise, une moniale en secret dans le monde. Ce qu’elle a dit, je ne le transmettrai pas, seulement elle m’a demandé de prier, elle a dit qu’elle allait à Moscou pour auprès de la Sainte Icône de la Très Sainte Mère de Dieu des Ibères, car elle allait mourir bientôt.
Mardi 24 novembre
Aujourd’hui, pour la deuxième fois, l’auxiliaire de cellule du Père Hilarion, l’auteur du livre «Sur les Monts du Caucase», est venu voir Batiouchka. Il a amené un garçon de 18 ans avec lui et a demandé qu’il soit accueilli dans notre monastère.
Aujourd’hui, pendant la bénédiction, j’ai dit à Batiouchka que des pensées m’ont attaqué, surtout pendant la prière, diverses pensées, en particulier de vanité, de jugement et d’autres.

Saint Nikon (Fragment de la Synaxe des Saints Startsy d’Optina. T.A. Mouchketov)

– Oui, bien sûr, elles attaquent, dit Batiouchka, toute la vie d’un moine est une lutte contre les pensées, c’est pour cela que la prière de Jésus est nécessaire…
Au fait, je vais écrire les paroles de Saint Siméon Le Nouveau Théologien à propos de la prière de Jésus: «Si quelqu’un ne s’unit pas au Seigneur Jésus ici sur terre, il ne s’unira jamais à Lui.» Cela, Batiouchka et moi l’avons lu dans le livre «Sur les Monts du Caucase» le 15 novembre à l’endroit où est expliquée la nécessité de la prière de Jésus.
– Ce sont des paroles terribles, dit Batiouchka. Quand j’ai lu cela, j’étais encore novice et j’ai commencé à en chercher la confirmation, car un seul saint, Saint Siméon, l’affirme. Je me suis alors souvenu du texte de l’Évangile, dans les Béatitudes : bienheureux les cœurs purs, car ils verront Dieu. Si vous réorganisez les mots, il s’avère que «seuls les cœurs purs verront Dieu». Et la prière intérieure de Jésus est l’union de l’esprit et du cœur dans leurs aspirations à Dieu…
Je ne me souviens plus exactement des mots de Batiouchka, et j’ai donc peur d’écrire trop hardiment, car je pourrais écrire quelque chose d’incorrect.
Jeudi 26 novembre
Hier soir, nous sommes restés longtemps assis à converser, Batiouchka et moi, jusqu’à minuit. Et nous avons travaillé. Ce n’est qu’à la fin que Batiouchka m’a raconté comment le Seigneur l’avait protégé de la gent féminine dans le monde, comment Il ne l’avait pas laissé se marier, bien qu’il y ait eu beaucoup de prétendantes.
«Comme des mouches sur le miel, elles avançaient vers moi. Je n’ai jamais été beau, vraiment, mais je n’ai pas été monstrueux non plus. C’est pourquoi j’attribue donc cela au fait que le malin les a lancées sur moi. Il a un bon flair, et il a senti qu’il y avait quelque chose en moi, c’est-à-dire une propension au monachisme, et il voulait l’éliminer, mais le Seigneur m’a sauvé…»
Vendredi 27 novembre
Je suis allé à la Liturgie; je me suis levé pour y aller dès qu’on a sonné. De façon générale, ces derniers temps, j’ai tendance à être vaincu par le sommeil. J’ai bu le thé avec Ivanouchka, puis suis allé chez Batiouchka, mais je ne l’a pas trouvé chez lui: Batiouchka était allé chez le Supérieur pour affaires. Hier, pendant les vigiles, Batiouchka nous a lu le « Paterikon » de l’Évêque Ignace. Hier après les vigiles, j’ai écrit une lettre à la maison.
Le 25 novembre, Batiouchka et le Père Nikita ont mangé ensemble, après la bénédiction, je me suis joint à eux, et nous avons parlé. Je pensais que si les esprits malins peuvent nous inspirer des pensées et si l’âme peut entendre les paroles des esprits mauvais, alors ceux-ci voient et entendent nos pensées.
Batiouchka a dit que ce n’était pas le cas:
– Les esprits mauvais peuvent nous inspirer des pensées, mais ils ne peuvent pas savoir si nous les avons acceptées ou non. C’est pourquoi ils font ceci: ils nous inspirent la pensée et nous regardent en face, voulant par l’expression de notre visage savoir comment nous avons réagi à ces pensées.
Cela m’a ouvert et éclairci beaucoup de choses. (A suivre)

Traduit du russe
Source :

Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.

Lettres du Saint Starets et Confesseur de la Foi, Nikon d’Optina (6)

Le site internet du Saint Monastère d’Optina propose une bibliothèque en ligne fournie. On y trouve de nombreux ouvrages des startsy d’Optina et des recueils de leurs lettres et homélies. Parmi ces ouvrages on compte le recueil des lettres écrites par le Saint Starets et Confesseur de la foi Nikon d’Optina, dont le journal fait l’objet d’une traduction depuis des mois sur le présent blogue. Nous proposons ici la traduction du recueil de ces lettres de Saint Nikon. Il ne s’agit plus du Novice Nicolas, auteur du journal précité, mais déjà du Hiéromoine Nikon, qui a intégré et mis en pratique dans son podvig les enseignements de son starets Saint Barsanuphe d’Optina, héritier de la tradition du Désert d’Optina.

Lettre à Matouchka AThanasia
Je souhaite à la vénérable Moniale Athanasia de se réjouir dans le Seigneur. Que la Grâce de Dieu t’affermisse sur ton chemin, que tu as emprunté par la miséricorde de Dieu. Le nom qui t’a été donné lors de ta tonsure, te fut donné en l’honneur de Saint Athanasia d’Égypte, dont on célèbre la fête le douze avril. Je donne ma bénédiction pour que tu lises sa vie, pour ton édification. Sois attentive au fait que le nom «Athanasia» signifie immortelle, et efforce-toi afin que ton âme vive une vie vraiment immortelle, c’est-à-dire, en Dieu et pour Dieu. Pareille vie doit commencer ici-même sur terre et se poursuivre dans toute sa beauté et béatitude au-delà de la tombe, dans la vie du siècle à venir. Prépare-toi à cette vie, fais-toi humble, endure patiemment. En toutes choses, remets-toi à la volonté de Dieu. Que toutes tes démarches soient accomplies selon les commandements de l’Évangile. Dis la prière de Jésus. Place une garde à ta bouche (Ps. 140;3). Fuis non seulement l’agitation en actes mais aussi en pensées, tout ce qui plonge l’homme dans l’agitation de ce monde, auquel tu as renoncé. Souviens-toi de cela. Que le Seigneur te garde sous la protection de Sa bonté.
Le pécheur Hiéromoine Nikon
Kozelsk
15/28 juin 1925
A Mademoiselle Antonina
Antonina, bien-aimée demoiselle de Dieu !
Que la bénédiction de Dieu soit sur Vous pour les siècles.
A ce jour, je ne suis pas encore parvenu à envoyer Votre lettre à Batiouchka Nectaire par l’entremise de quelqu’un de confiance. Par conséquent, après avoir discuté de votre question avec les pères à Kozelsk, j’écris en mon nom, car demain c’est déjà le 1er décembre, et quand cela sera possible, je vais essayer de vous envoyer la réponse du Starets. Notre opinion misérable et notre bénédiction, c’est que vous restiez ici en Russie, car la Sibérie est très loin de votre maison, de la famille, il n’y aura personne pour vous soutenir, personne pour se faire confiance l’un à l’autre. Bien que vous écriviez raisonnablement que vous espérez la miséricorde de Dieu, dans les mots: «Pour moi, je n’ai pas peur», il y a de la prétention, de l’arrogance – et cela ne devrait pas être: au plus on est humble, dans la fermeté, au mieux c’est. Écoutez toujours la voix et l’avis de votre petite maman: une maman a de l’intuition et la loi de Dieu demande l’obéissance aux parents. Je vous souhaite tout le meilleur. Nous prions pour vous. Paix et bénédictions de Dieu à Mademoiselle Lydia. Que le Seigneur vous garde tous sous l’aile de sa bonté.
Le pécheur Hiéromoine Nikon
Kozelsk
17/30 novembre 1926
A Matouchka Evdokia.
Le Christ est ressuscité !
Vénérable devant le Seigneur, Matouchka Evdokia,
Que la bénédiction de Dieu soit sur toi pour les siècles des siècles. Je te félicite à l’occasion de la Lumineuse Fête et te souhaite de tout cœur la paix de l’âme, la joie et toute consolation du Seigneur. Que notre Seigneur te garde sous Sa protection. Ne te décourage pas et ne t’afflige pas. Moi, je suis un pécheur et un rien du tout ; toi, cherche consolation en Dieu. Ma prière si pécheresse est toujours avec toi.
Paix et salut à toi.
Kem.
Printemps 1928.

A Matouchka Evdokia.
Vénérable devant le Seigneur, Matouchka Evdokia !
J’ai reçu votre petit paquet et je vous remercie de l’attention que vous me portez. Que Dieu vous sauve ! Je vous remercie aussi pour vos souhaits. J’ai déjà écrit que tous vos soins pour moi me font chaud au cœur, mais en toute conscience, je dis que je n’ai aucun besoin particulier. Si quelque chose peut m’être nécessaire, je l’écrirai. Le Seigneur me garde, je suis en santé et bien vivant. Mon affliction, vous la connaissez : je m’afflige au sujet de vous tous, je m’afflige pour mes péchés. Que notre Seigneur vous garde tous en bonne santé et bien-être. Je prie toujours pour vous, tous vous êtes proches et chers à mon cœur. Pour l’instant, je ne suis pas encore aux Solovkis. Si je m’y retrouve un jour, je vous le ferai savoir si Dieu le veut. Pour l’instant, dans ma vie ici, aucun nouveau déménagement n’est prévu.
J’ai été affligé de recevoir la nouvelle de la mort du Starets Nectaire. J’aimerais savoir comment fut sa fin.
Remets mes salutations à mes proches. Paix et bénédiction de Dieu à eux. A mes pères spirituels, je demande leurs bénédictions et leurs saintes prières. Et je demande aussi vos saintes prières. Que le Seigneur Dieu affermisse tes forces physiques et spirituelles. Je me souviens de toi, mon enfant. Paix et salut à toi, bénédiction de Dieu. Je te remets à la protection de la Très Saint Reine des Cieux. Gloire à Dieu pour tout. Ici, le temps est bon, sec ; le petit soleil réchauffe un peu, mais la différence de climat est énorme. Il n’y a quasi pas de nuit. Le Hiéromoine pécheur Nikon te bénit.
Kem
1928.
Traduit du russe
Source

Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.

Journal du novice Nicolas (Saint Nikon) d’Optina (94)

Né en 1888, le Saint Hiéromartyr Nikon (Beliaev) fut hiéromoine à la Skite du Monastère d’Optina. Il en fut un des derniers startsy, ayant eu pour père spirituel Saint Barsanuphe, lui-même fils spirituel du Saint Starets Anatole (Zertsalov) d’Optina. Un récit de sa vie a été traduit en plusieurs parties sur le présent blogue et est accessible ici. Le Monastère a publié le journal tenu par le novice Nicolas pendant les trois premières années de sa vie monastique. (Дневник послушника Николая Беляева (преподобного Оптинского старца Никона). Le texte ci-dessous est la traduction (sur base de l’édition de 2016) des premières pages de cet ouvrage remarquable, inédit en français. Le début de la traduction se trouve ici.

(…) (…) Avant-hier, c’est-à-dire le 17 novembre, Batiouchka nous a dit au Père Nikita et moi, qu’il y a exactement 20 ans, le 17 novembre 1889, il était presque mort. En août 1889, le vingt-six ou le vingt-sept, Batiouchka était pour la première fois chez le Père Ambroise. Suite au désir de Batiouchka d’entrer dans un monastère, le Père Ambroise lui conseilla de servir à l’armée jusqu’à sa retraite, c’est-à-dire servir encore deux ans et ensuite entrer au monastère, et pour l’heure, vivre dans le monde d’une manière qui plaisait à Dieu et jusqu’au Carême de Noël, c’est-à-dire d’août au quinze novembre, jeûner quatre fois. Cela sembla étrange et incompréhensible à Batiouchka : pourquoi donc? Mais tout se déroula, ainsi. En effet, le dix-sept novembre, Batiouchka s’est soudainement senti mal le soir, et on fit venir le médecin et le prêtre. «Et mes pensées me disaient: tu vas mourir maintenant», ajouta Batiouchka. «Je priai Dieu pour une seule chose : pouvoir communier aux Saints Mystères. L’horreur de la mort me saisit. Finalement, un prêtre arriva. Il commença à me confesser, je ne pouvais rien dire, seulement: «Pécheur, pécheur». Le prêtre me posa quelques questions, me donna l’absolution et me fit communier aux Saints Mystères. Je me suis calmé, même si le médecin avait dit que je ne vivrais pas jusqu’au matin. J’étais couché sur le lit, recouvert d’une couverture et je suis resté seul. Soudain, j’entendis comme une voix venant du ciel: «D-don’». C’était la cloche qui sonnait pour les matines dans le monastère des femmes, et dans mon âme, quelqu’un a dit: «Tu vivras…» Je me suis senti heureux et je me suis endormi. Le lendemain matin, mon ordonnance arriva et souleva doucement la couverture de ma tête, pensant me voir déjà mort, et je lui dis: «Qu’est-ce que tu fais, Alexandre?» L’ordonnance se réjouit et dit: «Mais Vous êtes vivant, Votre Noblesse?!» «Oui, je suis vivant». Bien que je sois ensuite demeuré alité pendant deux mois, luttant contre la mort. Je commandai d’ouvrir l’Évangile du jour et de le lire. Alexandre prit l’évangéliaire et commença à lire la parabole du figuier stérile: l’été prochain, coupe-le, s’il ne donne pas de fruit. Je pensais que, en effet, j’étais un figuier stérile, même si auparavant je pensais que j’avais diverses vertus, car j’étais sain en apparence, et j’ai alors décidé de changer ma vie. J’ai attendu la mort l’année suivante, le même jour, mais je suis resté en vie; et maintenant vingt ans se sont écoulés depuis ce temps-là…»
Vendredi 20 novembre
Il est 11 heures. Je viens de revenir de chez Batiouchka: on a célébré les vigiles. Nous étions quatre: Batiouchka, le Père Koukcha, Frère Nikita et moi.
J’ai reçu une lettre de Moscou, demandant de prier pour une connaissance qui est dans une situation matérielle très critique. Gloire à Dieu, je ne suis pas dans le monde.
Aujourd’hui, c’est le jour anniversaire de la naissance du Père Macaire, le starets. Auparavant, il y avait un office religieux, puis en quelque sorte on l’oublia. Maintenant, il y a eu une discussion à ce sujet; Batiouchka dit qu’il est nécessaire de le restaurer.
«Nous ne pouvons rien diminuer, ni enlever dans ce que nos grands startsy ont établi…»
Samedi 21 novembre
Je suis allé au monastère pour la Liturgie tardive et le repas, et ensuite, sur les tombes des Startsy, comme toujours. À mon retour du monastère, je suis allé saluer Batiouchka et après, j’ai rejoint la petite salle où la communauté prend le thé, pour y aider Frère Nikita. Je ne suis quasi pas resté dans ma cellule. Maintenant, je reviens des vigiles. Je sens que ma santé est devenue plus faible. Le problème à ma gorge ne passe pas du tout, et ma jambe gauche aux veines enflées se fait un peu sentir, surtout après les vigiles et même dans la position debout en général. Mais cela ne me dérange pas beaucoup.
Dimanche 22 novembre
Je suis resté chez Batiouchka toute la matinée jusqu’au repas. Pour une raison ou une autre, Batiouchka est allé au monastère, chez le Père Archimandrite, il me semble. À son retour du monastère, Batiouchka m’a dit qu’il avait reçu une lettre d’une de ses plus anciennes filles spirituelles, Mme Samarina, de Moscou. Elle appartient à la haute aristocratie. Quand elle était chez Batiouchka, elle a dit qu’elle avait aux jambes une maladie incurable, que tous les médecins de la ville de Moscou avaient refusé de la soigner. Cela a duré, semble-t-il, huit ans. Batiouchka lui a conseillé d’aller vénérer Saint Tikhon. Elle y était allée et envoyait une lettre disant qu’elle avait été guérie en deux jours.
Lundi 23 novembre
Aujourd’hui, j’étais lecteur pour la journée. Batiouchka a célébré avec le Père Nectaire. Après la pannychide, Batiouchka a dit un mot pour nous rappeler l’élévation de notre rang monastique, en particulier en ce qui concerne le respect des commandements d’amour, d’obéissance, de pauvreté. En tant que grand exemple de l’acquisition de ces vertus, Batiouchka nous a rappelé nos grands Startsy, les Père Macaire et Ambroise, dont nous honorons aujourd’hui la mémoire (jour de l’ange de leur baptême), et une fois encore Batiouchka a béni de lire leur vie.
Je suis allé au monastère pour en ramener de l’huile pour les lampades de ma cellule. Alors que je passais devant les tombes des Startsy, je me suis souvenu qu’aujourd’hui, c’était la mémoire de Batiouchka Macaire et Batiouchka Ambroise, et je les ai vénérés, j’ai demandé leurs saintes prières et leurs bénédictions, et j’ai prié pour le repos de leurs âmes.
(A suivre)

Traduit du russe
Source :

Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.

Lettres du Saint Starets et Confesseur de la Foi, Nikon d’Optina (5)

Le site internet du Saint Monastère d’Optina propose une bibliothèque en ligne fournie. On y trouve de nombreux ouvrages des startsy d’Optina et des recueils de leurs lettres et homélies. Parmi ces ouvrages on compte le recueil des lettres écrites par le Saint Starets et Confesseur de la foi Nikon d’Optina, dont le journal fait l’objet d’une traduction depuis des mois sur le présent blogue. Nous proposons ici la traduction du recueil de ces lettres de Saint Nikon. Il ne s’agit plus du Novice Nicolas, auteur du journal précité, mais déjà du Hiéromoine Nikon, qui a intégré et mis en pratique dans son podvig les enseignements de son starets Saint Barsanuphe d’Optina, héritier de la tradition du Désert d’Optina.

Lettre à Matouchka Anicia
Matouchka Anicia, malade, mon bonjour et la bénédiction de Dieu.
Par souci de brièveté, je n’écris pas séparément. Ne sois pas découragée, mon enfant; dans les afflictions, place ta confiance en Dieu. L’affliction ouvre l’entrée du cœur à la grâce de Dieu. Et je prie pour toi toujours, selon mes moyens. Je crois que le Seigneur ne t’abandonnera pas, même s’il t’envoie des afflictions. Elles sont notre lot. Soyons patients et le Seigneur nous sauvera. Pardonne. Je vous félicite pour le Saint Grand Carême qui approche. Le temps du carême est un temps saint. Bien que vous jeûniez en permanence à cause de votre pauvreté et de vos maux. Maintenant, que vos âmes et vos cœurs soient sobres dans le Seigneur, et que la grâce de la tendresse et de la consolation du Seigneur vienne à vous. Gloire à Dieu pour tout. Pardonne. Paix et salut.
Le pécheur Hiéromoine Nikon.
27 janvier / 9 février 1923

A Matouchka Anicia

Soeur Anicia, vénérable devant le Seigneur,
Paix à toi, et bénédiction de Dieu. J’ai reçu ta lettre. Je ne peux pas t’écrire beaucoup, je dirai brièvement ce qui s’impose. Tu es moniale, tu as accepté la tonsure et pris des vœux envers Dieu. Tu as promis obéissance, par conséquent, ce que tu as fait par obéissance et avec une bénédiction ne doit pas te troubler. Donc ne te chagrine pas de n’être pas retournée au pays. Ton pays, c’est ton saint monastère car tu t’es retirée du monde. Et quand tu as renoncé au monde et pris le vœux de servir Dieu, ne t’a-t-on pas dit que tu dois aimer Dieu plus que tes parents, et que «quiconque met la main à la charrue et regarde en arrière, n’est pas propre au royaume de Dieu» (Lc.9;62)? Il n’y a aucune raison de retourner dans le monde alors que tu jouis de la possibilité de vivre la vie monastique. Ne t’inquiète pas pour ton petit papa. Que le Seigneur te fortifie. Tu es à Dieu, travaille pour Lui. Paix à toi.
Bénédiction de Dieu à Sœur Daria et aux autres.
Le pécheur Hiéromoine Nikon.
Désert d’Optina
28 juin/ 11 juillet 1923

A Matouchka Anicia et d’autres.

Que la paix, le salut et la bénédiction de Dieu soient sur toi, mes enfants Anicia, Evguenia, Maria et autres, pour les siècles des siècles. Je te transmets mon ardente gratitude pour le colis ! Que le Seigneur te sauve !
La petite fiole ne s’est pas brisée, les pantoufles sont bonnes et il est possible que la bourka vienne à point en hiver. C’est alors qu’elle sera utile. Pour la pelisse, je ne sais que dire. Les choses superflues deviennent lourdes à transporter et je devrai vous renvoyer la sous-soutane. Elle alourdit sérieusement le bagage, c’est sûr que le but est que j’aie suffisamment de tout. Toutefois, par expérience personnelle, je ne sais pas ce qui est nécessaire pour l’hiver, ici. Si vous envoyez une pelisse, qu’elle soit la plus large possible pour que je la porte au dessus de la bourka, et longue aussi, plus que la bourka. Je peux marquer mon accord sur un pareil envoi seulement si ce n’est ni trop lourd, ni trop onéreux, et dans les petites tailles. La couleur n’a pas d’importance, ni non plus la présence d’une doublure.
Ma santé ne me préoccupe pas, jusque maintenant, et je rends grâce à Dieu pour Sa grande miséricorde envers moi, pécheur. Le temps est beau et les jours sont fort doux. Je remercie beaucoup les Matouchkas Anna et Olga pour les chaussettes qu’elles ont envoyées ; que Dieu les sauve. Que Dieu les bénisse. Je prie pour elles à la mesure de mes forces. Mes Ménées, je les ai échangés contre ceux de Mikhaïl Mikhaïlovitch, donc, ne les cherchez pas. Lui, je l’ai perdu de vue et je ne sais rien à son sujet. Mon bonjour à Matouchka Anicia. Que le Seigneur la console et affermisse les forces de son âme et de son corps. Je prie toujours pour elle, dans la compassion. Que la miséricorde et la volonté de Dieu soient sur elle et avec elle. Je prie pour la jeune Evguenia. Que le Seigneur guide sa vie en vue de son salut.
Je suis très content que la santé de Batiouchka se rétablisse. Je demande ses saintes prières et bénédictions. Bonjour à la jeune Maria et aussi à sa maman. Si le Seigneur ne lui donne pas une bonne santé cela signifie qu’il doit en être ainsi. Que la volonté de Dieu soit faite. Je prie toujours pour elle. Que Dieu fasse que vos vies soient bonnes et vous mènent au salut. Ne vous affligez pas pour moi. Je ne peux accepter cela. Gloire à Dieu pour tout. Je vous bénis du signe de la Croix. Pardonnez-moi.
9/22 août 1928
Kem.
Traduit du russe
Source

Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.

Journal du novice Nicolas (Saint Nikon) d’Optina (93)

Né en 1888, le Saint Hiéromartyr Nikon (Beliaev) fut hiéromoine à la Skite du Monastère d’Optina. Il en fut un des derniers startsy, ayant eu pour père spirituel Saint Barsanuphe, lui-même fils spirituel du Saint Starets Anatole (Zertsalov) d’Optina. Un récit de sa vie a été traduit en plusieurs parties sur le présent blogue et est accessible ici. Le Monastère a publié le journal tenu par le novice Nicolas pendant les trois premières années de sa vie monastique. (Дневник послушника Николая Беляева (преподобного Оптинского старца Никона). Le texte ci-dessous est la traduction (sur base de l’édition de 2016) des premières pages de cet ouvrage remarquable, inédit en français. Le début de la traduction se trouve ici.

(…) «Il y a deux monachismes: l’extérieur et l’intérieur», me dit un jour Batiouchka. «Le monachisme extérieur, comme on dit le «monachisme au klobouk», est facile à acquérir. Comme l’écrit Saint Jean Climaque, il est facile de se faire moine extérieurement, mais il est difficile de devenir moine intérieurement. Ce monachisme intérieur on peut le trouver même dans le monde, bien que ce soit seulement «une possibilité». Et du monachisme intérieur, on en parle maintenant si rarement, on ne le comprend quasi plus…»
J’aimerais consigner une des conversations avec Batiouchka au sujet de la prière de Jésus, qui a eu lieu le 26 octobre après le thé à 14 heures, l’après-midi.
Je me souviens quand je suis venu au près de Batiouchka sous l’impression de lire du livre «Sur les Monts du Caucase». <…>
Batiouchka dit aussi:
«Pendant longtemps, je ne pouvais comprendre ce que signifiait unir l’esprit avec le cœur. En substance, cela signifie que toutes les forces de l’âme sont réunies pour produire ensemble leur aspiration à Dieu, ce qui n’est pas possible si elles sont séparées. J’observe cette loi de l’union non seulement dans le cas de la prière de Jésus, mais partout. Par exemple, lorsque nous n’avons pas de cohésion des forces dans une guerre contre l’ennemi, alors l’ennemi, attaquant un détachement, puis l’autre, vaincra bientôt toute l’armée, détruisant un détachement après l’autre.
De même, le soleil, qui éclaire la terre, ne la brûle pas, car ses rayons se dispersent sur la surface de celle-ci et, en particulier sur une partie. Mais si nous prenons du verre (une loupe) et que ce verre concentre tous les rayons en un point donné, le bois, le papier ou quoi que ce soit d’autre placé là, va s’enflammer. La même chose peut être dite à propos de la musique. Quelle est la beauté des notes ou des sons pris isolément ou en désordre? On peut dire qu’il n’y en a aucune. Mais ces mêmes sons harmonisés dans les œuvres d’artistes-poètes géniaux revêtent une grande force et une grande beauté. Et je ne mentionne même pas la peinture et d’autres arts… Dans ces conversations avec vous, je ne me limiterai pas à cela, j’irai plus loin. C’est un nœud tel que peu importe combien vous le dénouez, il restera toujours un nœud.
La prière de Jésus n’a pas de limites… L’esprit, lorsqu’il s’exerce à lire les Saintes Écritures et à prier, etc., est purifié des passions et éclairé; lorsqu’il n’est immergé que dans les choses terrestres, il devient gris, et en quelque sorte incapable de capter et comprendre ce qui est spirituel.

Saint Barsanuphe d’Optina

J’ai connu deux frères; l’un était alors médecin et l’autre professeur à l’Académie de Théologie (Aujourd’hui Métropolite Antoine de Saint-Pétersbourg). Ces deux frères choisirent des chemins différents et, après des années de séparation, ils se sont réunis et ont entamé une conversation. Bien sûr, la conversation a également touché le domaine spirituel. Tout ce que le médecin disait était clair pour le professeur de l’Académie, mais ce que le professeur disait ne pouvait être compris par le médecin; non pas qu’il ne voulait pas, non, il ne le pouvait pas, peu importe comment il essayait, et il finit par demander à son frère d’orienter leur conversation sur un autre sujet.
Par conséquent, il est nécessaire de s’exercer dans le domaine spirituel et de vaincre toutes les passions alors qu’elles sont encore peu profondes en nous. Les passions sont faciles à vaincre dans les pensées, mais quand elles se transforment en mots et en actes et prennent racine, cela devient très difficile, presque impossible…»
Et le Père a beaucoup parlé, mais comment me souvenir de tout, ou plutôt, comment tout transcrire?
Dimanche 15 novembre
Hier, j’ai essayé de chanter dans le chœur, mais je sens que ma gorge n’est toujours pas rétablie. Cela devient très long, car j’ai attrapé un rhume à Moscou, et nous sommes revenus de Moscou, il y aura un mois le dix-sept. Aujourd’hui, je n’ai donc à nouveau pas chanté à la Liturgie. Ivanouchka a également attrapé quelque chose: il n’est allé ni aux vigiles, ni à la Liturgie. Et on entend beaucoup dire que nous sommes nombreux à la Skite a avoir attrapé quelque chose.
Lundi 16 novembre
Hier soir, après la bénédiction, après avoir travaillé sur des choses très importantes, Batiouchka et moi avons repris la lecture. J’ai lu le petit périodique «Comportement et foi», composée par M. A. Novoselov, mais ni moi ni Batiouchka n’avons aimé ces feuillets, à cause de leur sécheresse et leur abstraction. Je n’ai ressenti aucune inspiration quand j’ai lu. Ensuite, nous avons sorti le livre «Sur les Monts du Caucase» et avons regardé les endroits que Batiouchka avait souligné. Après cela, nous avons parlé pendant un certain temps.
Batiouchka m’a raconté un rêve qu’il a fait, la vision d’un péage. Mais je ne peux pas tout transcrire.
Je me suis dit que j’allais tout de même noter l’une ou l’autre chose, mais je n’y suis pas parvenu. Ivanouchka est arrivé et m’a pris plus d’une heure de mon temps. Maintenant, je ne le comprends plus, d’autant plus qu’il ne dit pas ce qu’il ressent et pourquoi il pleure. Je suis le seul à avoir de l’importance pour lui. Il m’a dit que rien d’autre dans la Skite ne lui tenait à cœur, et que même quand il avait revêtu en même temps que moi le rason, il hésitait à le revêtir ou à quitter la Skite. Sauve-le, Seigneur, et aie pitié de lui.
Jeudi 19 novembre
Aujourd’hui, il y a eu une Liturgie, on commémorait quelqu’un, on a mentionné le repos de l’âme de la servante de Dieu Sofia. Chez Batiouchka, j’ai oublié de demander qui c’était. Après la Liturgie, je suis allé dans ma cellule, puis chez Batiouchka. Frère Kyrill est arrivé (hier). Il est affecté à l’état-major général et se rend là-bas, et sur la route, il fait une halte à Optina. Aujourd’hui, jusqu’au repas, je suis resté avec Batiouchka, mais il y avait beaucoup de monde, et tout ce temps j’ai lu les trois enseignements de Mgr Ignace «Sur la fin du monde». Ces enseignements sont bons, comme en général tous les écrits de ce Saint Évêque du Christ.
Hier soir, Batiouchka était tourmenté par diverses circonstances. Je suis allé faire les cinq cents dans l’oratoire, et le Frère Nikita a lu les prières du soir avec Batiouchka. Après les prières, nous avons travaillé un peu, puis nous avons discuté pendant environ une demi-heure, et je suis rentré dans ma cellule. (A suivre)

Traduit du russe
Source :

Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.