agios-louka-st-lukaInnombrables sont les miracles accomplis par l’intercession du Saint Archevêque et Confesseur de la Foi Luc de Crimée. Saint Luc a illuminé la Terre de Russie et il illumine aujourd’hui le monde entier. Puisse-t-il nous accompagner dans la joie sur notre chemin vers le Christ et nous donner la force de porter notre croix. Afin de nous y aider le Saint homme a prononcé ses homélies et écrit ses textes. Ce site propose la traduction d’homélies et de textes de Saint Luc, à notre connaissance inédits en langue française. L’homélie ci-dessous a été prononcée le 10 avril 1948, Samedi de la quatrième semaine du Grand Carême. Elle est intégrée dans le recueil intitulé «Hâtez-vous à la suite du Christ» (Спешите идти за Христом).

On m’a souvent demandé, et on continue à me demander, comment apprendre à prier et comment se débarrasser de la distraction pendant la prière. On dit que pendant la prière, tout attire et dissipe l’esprit, même le rayon de lumière qui tombe sur une icône et le faste de la liturgie épiscopale. On me dit : «Je ne parviens pas à me concentrer, je ne parviens pas à prier comme il faut». Et on me demande d’enseigner. Est-ce si simple? Non, ce n’est pas simple, pas simple du tout. Vers qui faut-il se tourner pour apprendre? Il s’agit pour l’homme de l’affaire la plus grande, la plus importante, la plus difficile de toutes. Car en fait, qu’est-ce que la prière, la vraie prière? C’est une relation directe de l’esprit de l’homme avec Dieu.Et donc, si vous comprenez la prière de cette façon, je vous ai donné la réponse fondamentale et essentielle à la question concernant la manière de se débarrasser de la distraction. Je vous dis que la prière est une relation à Dieu. Il faut donc se montrer digne de cette relation, il faut être à la hauteur qu’elle requiert. Et cette relation avec Dieu, sera-t-elle facile et simple, pour l’homme qui se meut sans cesse dans l’agitation du monde, qui se souvient si rarement de Dieu, l’homme qui est empêtré dans ses passions, dans la luxure, dans les péchés?
La relation avec Dieu exige une énorme lutte ascétique, elle exige que toutes vos pensées, vos idées, vos aspirations, se concentrent sur ce qui est supérieur, sur ce qui est saint, qu’elles soient toutes dirigées vers Dieu. Seul celui qui oriente sans cesse ses pensées et ses aspirations vers Dieu, qui essaie de toutes ses forces de se détacher des préoccupations de ce monde, des soucis quotidiens, qui consacre beaucoup de temps à la lecture des Saintes Écritures, à la lecture des vies des Pères, qui prie souvent et sincèrement, et qui surtout met en œuvre consciencieusement les Commandements du Christ, celui-là apprendra la prière, la prière profonde, sincère. Car seul celui qui met en œuvre les Commandement du Christ devient proche du Christ. Celui-là, le Seigneur l’appelle Son ami. Voilà l’essentiel de la réponse : il faut s’efforcer d’œuvrer à devenir saint, à tourner, de toutes nos forces, toutes nos pensées et notre esprit vers Dieu.
Les pensées des philosophes, des savants, pensées toujours concentrées sur les questions essentielles de l’existence, sur les questions scientifiques les plus ardues, se distinguent par leur concentration. Ces pensées sont clouées à ces questions, elles n’en dévient pas, elles n’errent pas de-ci de-là. Les pensées de ces hommes et femmes se tiennent collées à ce à quoi ces gens ont consacré leur vie. Ces hommes et femmes sont toujours concentrés, et nous devons les imiter, imiter leur manière de concentrer toutes leurs pensées, toutes leurs aspirations aux questions supérieures de la philosophie et de la science. Ainsi, si nous voulons entretenir une relation avec Dieu, nous devons vivre en Dieu, nos pensées doivent être toujours dirigées vers ce qui est supérieur. Pour ce faire, les hommes et femmes à l’esprit fort, remplis d’amour pour Dieu, partirent au cœur des forêts sauvages ou au milieu des déserts pour apprendre à prier. Et ils y apprirent à prier car leurs pensées tournées auparavant vers le monde se tournèrent vers Dieu et leur vie fut orientée vers l’acquisition de la perfection spirituelle.
Ce sont les gens qui n’empruntent pas du tout cette voie, qui vivent en permanence dans les soucis du monde, qui se plaignent et disent : «J’ai beau essayer, ma prière ne sort pas, j’ai beau essayer, je suis sans cesse distrait». Mentalement, ils en arrivent à la conclusion que ça ne fonctionne pas, que cela ne sert à rien d’essayer, qu’ils sont par nature distraits et enclins à une pensée vagabonde. Beaucoup disent alors que cela provient de l’imperfection de notre nature. C’est exactement comme si des gens qui ne savent pas nager se jetaient à l’eau, et voyant qu’ils ne parviennent pas à se maintenir, se disent : «Mon corps est plus lourd que l’eau, c’est impossible de le faire flotter. Que faire? Ma nature est telle qu’il m’est impossible de nager et cela ne me sert à rien d’essayer». N’est-ce pas de l’aveuglement? N’existe-t-il pas une multitude de gens qui parviennent à nager parfaitement? Le problème, c’est que les autres ne veulent pas apprendre à nager. Il est donc futile d’accuser la nature quand on est distrait pendant la prière. Ce n’est pas la nature qui est coupable, mais la réticence à concentrer l’esprit sur la prière.
Le Saint Prophète David dit : «Heureux l’homme dont l’aide vient de Toi, Seigneur; Il a disposé en son cœur des degrés pour monter» (Ps.83,6). Heureux l’homme qui a placé son aide en le Seigneur? Pourquoi a-t-il de l’aide? Parce qu’il a placé des degrés dans son cœur pour monter, parce qu’il a pour but d’élever toujours son cœur vers Dieu. Voilà un homme de bien : il recevra l’aide de Dieu, il recevra la force de la prière. Malheur à l’homme qui n’élève pas son cœur, qui ne craint pas que son cœur s’abaisse toujours plus et s’emplisse de bassesses et de passions mauvaises. Il ne recevra pas l’aide de Dieu, il ne saura pas prier.
Le Saint Prophète Jérémie a dit : «Jusqu’à quand resteront-elles en ton cœur, les pensées qui causent tes maux?» (Jér.4,14). C’est donc en cela que réside l’essentiel, l’indispensable : chasser toutes les mauvaises pensées de notre cœur. Au plus de pensées impures nous aurons en notre cœur, au plus lentement nous parviendrons à les en déloger. Et quand notre cœur est empli de telles pensées impures, comment être capable de prier? Vous comprenez : la distraction dans la prière est le résultat de ce que notre cœur ne s’élève pas en permanence, du matin au soir, vers Dieu, de ce que nous n’avons pas pour but de notre vie de nous élever vers Dieu, et nous ne remarquons pas que nous descendons toujours plus bas.

Voilà pourquoi il n’y a pas de prière.
Vous connaissez la grande prière, que l’on considère importante et même fondamentale pour les moines, et qu’ils pratiquent en faisant des grandes ou des petites métanies : «Seigneur Jésus Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur». Cette prière possède une grande puissance. Celui qui s’y tient, qui s’y habitue, qui la répète sans cesse, recevra inévitablement la grâce de Dieu et apprendra à prier. Mais lorsque je leur conseille de commencer cette prière, les gens essaient un peu, et puis abandonnent et viennent me dire : «Nous répétons la prière de façon mécanique et nous n’en retirons aucun bénéfice». Ils voudraient donc immédiatement en tirer un bénéfice, ne comprenant pas que pour recevoir la grande faculté de prier, il faut traverser de longs labeurs spirituels et physiques ; elle n’est donnée à personne de façon immédiate.
D’aucuns vont même jusqu’à se plaindre de ce que la liturgie épiscopale les distrait, avec les changements d’ornements incessants… A quoi servent-ils donc!… Ils ne savent pas de quoi ils parlent. Évidemment, certains ornements sont changés. A plusieurs reprises, on enlève et ensuite on remet l’omophore à l’évêque. Qu’est-ce que cela signifie et pourquoi fait-on cela? Dès qu’on a la réponse à ces questions, on ne parle plus de changement d’ornements, et on ne se trouble plus parce qu’on enlève et ensuite on remet l’omophore à l’évêque. L’omophore est l’ornement essentiel du hiérarque. Chaque saint ornement revêt une signification particulière et l’omophore signifie la brebis perdue que notre Seigneur Jésus Christ a retrouvée dans le désert et ramena sur Ses épaules. L’omophore signifie l’obligation particulière qu’a le hiérarque, pasteur du Christ, de retrouver et de ramener sur ses épaules les brebis perdues. Le hiérarque représente Jésus Christ Lui-même, et à certains moments au cours de la liturgie, c’est donc comme si le Christ Lui-même faisait son apparition au milieu de nous. Ainsi, lors de la lecture de l’Évangile, c’est comme si vous entendiez le Seigneur Jésus Lui-même. C’est comme s’Il était parmi nous et dès lors, le hiérarque doit porter l’omophore, signe le plus élevé de sa dignité sacrée. Ce faisant, il manifeste son humilité devant le Christ. De même lors de la Grande Entrée, le diskos avec le pain béni et la coupe avec le vin signifient le Seigneur qui avance vers Sa passion, et l’évêque, rencontrant le Christ aux Portes Royales et recevant du prêtre et du diacre le diskos et la coupe ne peut porter l’omophore. Et lorsqu’arrivent les moments essentiels du Mystère de la Liturgie, alors que l’évêque prononce les paroles du Christ : «Prenez, mangez, ceci est mon corps, rompu pour vous, pour la rémission des péchés…Buvez en tous Car ceci est mon sang, le sang de la Nouvelle Alliance qui est versé pour beaucoup en rémission des péchés» (Mat.26,26-28), alors que l’évêque bénit le pain et le vin, appelant l’Esprit Saint, par la force Duquel pain et vin sont changés en véritables Corps et Sang du Christ, lorsqu’il accomplit le grand Mystère, l’évêque doit porter en plénitude l’ensemble de ses ornements sacrés. Et lorsque le Mystère est accompli, il doit retirer l’omophore, car le Christ Lui-même est présent.
Il ne s’agit donc pas d’un changement de vêtement, mais de gestes sacrés à portée symbolique. C’est pourquoi la pompe et la grandeur de l’office épiscopal ne doit pas vous troubler ni vous empêcher de prier. Au contraire, ceux qui comprennent la grandeur du sens de cette liturgie atteignent, grâce à celui-ci, plus de profondeur dans leur prière.
Ce qui vous dérange, c’est le vagabondage permanent de vos pensées car vous vivez constamment dans l’agitation du monde. Vous ne concentrez vos pensées que rarement, et peu, sur ce qui est le plus important, le plus grand, le plus saint. Vous comprenez donc combien ardu est l’apprentissage de la prière, vous pouvez comprendre que la prière libre de toute distraction, libre de tout vagabondage de la pensée, seuls les saints l’atteignent. Pénétrez-vous humblement de la conscience de ce que votre prière est faible car vous êtes loin de la sainteté. Alors, priez sincèrement, comme les petits enfants, comme vous le pouvez. Le Christ entend votre prière. Toute faible qu’elle soit, elle monte haut, très haut vers Dieu, et le Seigneur accepte toutes les prières. Ne vous découragez pas, ne baissez pas les bras, et ne vous attendez pas à ce que la prière se défasse rapidement et facilement de toute distraction.
Traduit du russe.