Né en 1888, le Saint Hiéromartyr Nikon (Beliaev) fut hiéromoine à la Skite du Monastère d’Optina. Il en fut un des derniers startsy, ayant eu pour père spirituel Saint Barsanuphe, lui-même fils spirituel du Saint Starets Anatole (Zertsalov) d’Optina. Un récit de sa vie a été traduit en plusieurs parties sur le présent blogue et est accessible ici. Le jeune Nicolas, qui devint le moine Nikon, entra comme novice à la Skite d’Optina en 1908. Le Monastère a publié le journal tenu par le novice Nicolas pendant les trois premières années de sa vie monastique. (Дневник послушника Николая Беляева (преподобного Оптинского старца Никона). Le texte ci-dessous est la traduction (sur base de l’édition de 2016) des premières pages de cet ouvrage remarquable, inédit en français. Non seulement il fait découvrir la profondeur spirituelle du jeune moine, mais aussi celle de son père spirituel, Saint Barsanuphe d’Optina. En effet, le texte rapporte la teneur d’une série d’entretiens entre les deux saints et expose ainsi une partie des enseignements spirituels de Saint Barsanuphe, dont l’importance réside en ce que ces enseignements, éloignés des généralités, étaient adressés au novice confronté aux tentations et dont le père spirituel clairvoyant percevait parfaitement l’entièreté du chemin de vie

(…) Oui, je ne vois qu’une seule issue à ma situation, c’est le repentir et la communion aux Saints Mystères. D’abord, je dois me purifier par le repentir et ensuite, recevoir en moi le Corps et le Sang du Christ. Le repentir, la confession, quel grand Mystère, mais la communion est encore plus grande et plus sainte. Car alors, j’accueille en moi Jésus Christ Lui-même, Son Corps Très Pur, Son Sang, Sa Divinité. Je m’unis à Lui de la façon la plus intime. «Celui qui mange ma chair et boit mon sang, demeure en moi, et moi en lui», nous dit le Sauveur. Toute l’importance, toute la nécessité de ce Mystère nous apparaissent dans les paroles du Sauveur selon lesquelles seuls ceux qui mangent son Corps ont la vie, et ceux qui ne le mangent pas n’ont pas la vie en eux. Oui, ce saint Mystère est grand, et nécessaire pour nous, et terrible aussi.
Comment moi, indigne et pécheur, puis-je m’avancer vers la Sainte Coupe? Moi je n’ai pas la vie, j’avance pour ma condamnation. Car tous ceux qui mangent ce Corps indignement «mangent et boivent leur propre jugement». Oui, c’est terrible!
C’est pourquoi, toute cette semaine, en commençant dès lundi, je dois aller à l’église et prier à la maison et m’analyser intérieurement, prendre conscience de mon indignité, et ensuite recevoir le Mystère de la confession avec le désir sincère de me corriger et de changer toute ma vie. Après, tout de même, ayant été purifié, je dois recevoir, avec humilité et une crainte déjà un peu moindre, le Corps et le Sang du Christ. Il ne fait aucun doute que cela m’aidera dans mon souhait de devenir un homme et peut-être, fût-ce un peu, d’ouvrir les yeux.
Je n’ai pas la vie en moi. Je le comprends très bien: pas une seule fois, je ne me suis préparé, confessé et ai communié.[Note de l’éditeur : Visiblement, le Saint Père Nikon veut parler de la préparation, de la confession et de la communion en toute conscience, car dans les phrases qui suivent, il laisse entendre qu’il se préparait et communiait à la Sainte Coupe chaque année] Pas une seule fois. C’est effrayant. Pourquoi est-ce donc que je raconte que chaque année je me préparais pieusement? Quel sens peut avoir pareille préparation? L’année dernière encore, je m’avançais, s’il-vous-plaît, en priant vers la Sainte Coupe. Mais c’est loin d’être suffisant.
Je me souviens comme il fut difficile de me séparer du monde et de ses satisfactions charnelles. En fait, je ne voulais pas m’en séparer du tout. Serait-ce cela, le repentir? Non, tout cela ce n’est que formel, extérieur. Ce n’est pas ainsi qu’il faut être.
Maintenant, j’ai décidé de me corriger, je veux changer de vie, et on dirait que je le veux sincèrement. S’il en est ainsi, alors, me préparer a un sens pour moi, car j’ai l’intention de le faire vraiment, comme il faut. J’espère même que cela pourra servir de base à ma vie et mes activités futures.
J’ai voulu me préparer pendant le Carême de la Nativité, mais j’ai raté mon coup car alors, les pensées dont j’ai maintenant conscience n’étaient pas encore nées. Demain (qui d’ailleurs est déjà aujourd’hui), si Dieu le veut, j’irai auprès de Batiouchka. Peut-être parviendrai-je à lui raconter un peu. C’est quelqu’un qui a de l’âge, visiblement très croyant. Peut-être me donnera-t-il un bon conseil?

29-30 janvier

Hier, j’ai exprimé la pensée selon laquelle le signe principal de la vie spirituelle est l’aspiration à la connaissance de la vérité. Mais soudain, je me suis dit : peut-être n’en est-il pas ainsi?  J’ai alors commencé à réfléchir, et je vois que ce que j’ai exprimé hier est juste.
Dans l’Antiquité, Socrate, philosophe extrêmement érudit, expira en disant : «Je sais seulement une chose, c’est que je ne sais rien». Effectivement, la vérité est inaccessible. Au moment où on s’approche d’elle, on a l’impression qu’elle s’éloigne. Tout au plus la voit-on là-haut, très haut au-dessus de soi. Notre intelligence paraît si faible, si insignifiante, comparée à elle. Tout cela est vrai. Mais Socrate a vécut avant la Nativité du Christ, et la vérité proclamée par le Christ lui était inconnue. Mais à nous, elle est accessible. Et il nous est dit où la trouver : elle est dans le Christ Jésus. Mais malgré cela, elle reste impénétrable, nous pouvons seulement nous approcher plus ou moins d’elle et elle s’ouvre à nous dans la mesure même où nous aspirons à elle ; d’elle-même, la vérité ne se dévoile jamais si l’homme ne le veut pas.
Et la voie de la connaissance de la vérité est ardue, très ardue, particulièrement pour moi et tous les pécheurs qui me ressemblent. Mais cette voie est ardue seulement au début, après, elle devient plus agréable. Cette voie de la connaissance de la vérité, ce sont les vertus, l’amour, la vie en conscience, selon la foi en Dieu. Il n’est pas facile de débuter sur cette voie car elle requiert le renoncement à soi, il faut être prêt à tout ce qui se présentera, quoi que ce sera. L’homme humble peut cheminer sur cette voie, l’orgueilleux n’y parviendra pas. Ainsi donc cette voie de la connaissance de la vérité est la vie spirituelle de l’homme, et l’homme qui n’avance pas sur cette voie est spirituellement mort.
Le prêtre n’était pas là car il célébrait des vigiles. J’ai commencé à me préparer. Je suis allé à la Liturgie à l’église de la Très Sainte Mère de Dieu de Kazan. C’est très pratique. La Liturgie est vers 10h. Ils célèbrent de façon stricte. Les prosphores sont impeccables. Demain, j’irai encore à la Liturgie. Je dois prier. Et prier le plus possible et avec le plus grand zèle. (A suivre)
Traduit du russe
Source :                       

Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.