gerondissa-makrina-barqueLa version russe du texte ci-dessous a été publiée le 04 juin 2016 sur le site Pravoslavie.ru.  (On célèbre la mémoire de Gerondissa Makrina le 04 juin) Ce texte fut préparé par Madame Olga Rojniova à partir du livre «Paroles du Cœur», (Λόγια Καρδίας ) publié en grec par le Monastère de la Panagia Hodigitria,  du film «Échos du Cœur», consacrés tous deux à Gerondissa Makrina, ainsi que du livre «Ma Vie avec Geronda Joseph» de Geronda Ephrem de Philotheou et d’Arizona.

Gerondissa Makrina, l’higoumène du Monastère de la Panagia Hodigitria, situé à proximité de Volos, fut une fille spirituelle de Geronda Joseph l’Hésychaste et de Geronda Ephrem de Philotheou et d’Arizona. Gerondissa dirigea pendant plus de trente ans, de 1963 à 1995, un monastère fondé avec la bénédiction de Geronda Joseph l’Hésychaste. Elle acquit maints dons spirituels et fut bénie par des états spirituels élevés.
La vie de Gerondissa fut marquée par la difficulté et de nombreuses peines. Elle naquit en 1921, dans un village pas très éloigné de la tristement célèbre ville de Smyrne en Asie Mineure. Un an à peine après sa naissance, la terrible tragédie s’abattit sur la ville et ses environs; ce fut l’épisode final de la guerre gréco-turque de 1919-1922. Le 9 septembre 1922, les soldats turcs faisaient leur entrée dans la ville de Smyrne (appelée de nos jours Izmir). Ils y organisèrent un abominable massacre de la population chrétienne. Au cours de ce massacre et de l’incendie qui s’en suivit, environ deux cent mille hommes et femmes furent tués. Les Chrétiens survivants quittèrent Smyrne et la ville devint complètement turque.
La famille de Gerondissa survécut miraculeusement à la catastrophe d’Asie Mineure – l’expulsion des populations grecques indigènes des terres de leurs ancêtres – et elle parvint à s’installer en Grèce. Combien pénible était le sort d’un million et demi d’immigrants hellénophones d’Asie Mineure réfugiés dans une Grèce déchirée par la guerre. Un nombre important d’entre eux moururent de faim ou de maladie.
Gerondissa Markella, du Monastère de la Très Sainte Theotokos «Source de Vie», à Dunlap, en Californie, racontait, à propos des parents de Gerondissa Makrina : «Ses parents, sa maman et son papa, étaient des gens très spirituels. Un jour son papa lui dit : ‘Je mourrai cette année, le lundi pur. Maman mourra l’an prochain’. Et il en fut ainsi. Le Grand Carême commença et il mourut. Et un an après, la maman mourut». La petite fille de dix ans fut obligée de travailler pour un salaire dérisoire, afin de nourrir son petit frère et elle-même. Mais le Seigneur n’abandonna pas les orphelins. Maria parvint à faire face et à élever son jeune frère. Ce qu’il lui en coûta, seule la Panagia, qui prie pour les orphelins, le sait. Alors qu’elle était encore enfant, le Seigneur envoya à Maria une connaissance, accompagnée de l’un des disciples de Geronda Joseph l’Hésychaste, le Hiéromoine Ephrem (Karaiannis), qui lui enseigna la prière de Jésus. Déjà elle était une ascète zélée. Elle aimait particulièrement prier pendant la nuit. Maria vécut avec son petit frère à Volos, ville du centre de la Grèce, située à trois cents kilomètres d’Athènes, près du Mont Pelion, le plus beau du pays et glorifié par la poésie grecque.
La vie semblait s’améliorer quand le 28 octobre 1940, l’armée italienne commença à envahir la Grèce, depuis l’Albanie. La Grèce venait d’entrer dans la Seconde Guerre Mondiale. Maria était âgée de dix-neuf ans. Les vaillants soldats grecs défirent les envahisseurs ; les Italiens durent faire retraite en Albanie. Mais en avril 1941, Hitler, postposant de six semaines son agression de l’Union Soviétique, envoya ses troupes avec mission de capturer la Grèce. Celle-ci fut occupée par les soldats allemands et les horreurs de la guerre et de la faim reprirent. Par comparaison avec les autres pays d’Europe, la Grèce eut à endurer des destructions particulièrement sévères. Seule la Russie eut à souffrir plus encore. Les habitants affamés étaient réduits à manger leurs mules, des hérissons et des tortues.
Dans ses mémoires, le diplomate suédois Paul Mon, membre de la Croix Rouge en Grèce, décrivit la capitale du pays : «La ville offrait un spectacle désolant… Des enfants au visage crayeux et des jambes pas plus épaisses que les pattes des araignées luttaient avec des chiens sur des monceaux d’ordures. Lorsque commença l’automne 1941, les gens tombaient d’inanition dans les rues. Cette année-là, chaque matin d’hiver, on trébuchait sur des cadavres».
gerondissa-makrina-maria-jeuneA Volos les épiceries étaient vides. Maria et son frère étaient affamés, sur le point de mourir d’épuisement. Ils furent forcés de se séparer dans l’espoir que l’un d’eux au moins pourrait se sauver. Le jeune frère se rendit à Thessalonique, la deuxième ville de Grèce, pensant qu’il trouverait là de quoi se sustenter. Maria demeura à Volos, se lamentant sur leur séparation. Elle pria ardemment et cette prière ardente fut son principal soutien dans sa vie si éprouvante.
La guerre finie, Maria travailla dur pour pouvoir s’acheter du pain. Elle partageait ses gains avec les pauvres. Elle était connue pour sa gentillesse, sa tolérance, sa grande charité et sa patience dans les difficultés. Geronda Ephrem de Philotheou naquit lui aussi à Volos, où il passa son enfance et son adolescence. Il connaissait Maria, depuis son tout jeune âge et il se rappelait d’elle : «Un jour, à Pâques, après avoir travaillé dur et longtemps, elle réussit à économiser assez d’argent pour s’acheter un cierge pour l’office de la Lumineuse Résurrection du Christ. Mais quand elle arriva à proximité de l’église, elle vit une jeune fille pauvre et souffrant de la faim. Oubliant sa propre pauvreté, elle lui remit tous ses gains, et alla à l’église sans cierge. Quand vint le moment de recevoir la Sainte Lumière, alors que tous se pressaient autour du prêtre avec leurs bougies, Maria, dépourvue de cierge, demeura derrière tout le monde. Retirée dans un coin obscur, elle pleurait, disant ‘Oh mon Christ ! Quelle pécheresse je suis. Je ne suis même pas digne d’un cierge pour Ta fête’. A ce moment-même, à travers ses larmes, elle vit la Lumière Incréée, et perdit connaissance. Des gens la prirent dans leurs bras et la ramenèrent chez elle, pensant qu’elle était tombée d’inanition».
Gerondissa elle-même fit part d’une semblable expérience spirituelle aux sœurs de sa communauté : «A cette époque, le père avait coutume de s’incliner profondément devant l’icône de la Résurrection du Christ dès qu’il rentrait de la procession pascale. Comme nous l’imitions, dès que j’embrassai l’icône, je sentis comme si la Sainte Résurrection entrait dans mon cœur et le remplissait. J’entendais une voix, comme si tous les haut-parleurs du monde étaient branchés… J’entendais l’Évangile de Pâques à l’intérieur de moi-même, alors que le père ne l’avait pas encore lu. Ne comprenant pas ce qui m’arrivait, je perdis connaissance. Quand je revins à moi, les paroles de l’Évangile résonnaient dans mes oreilles et demeuraient en mon cœur. J’étais imprégnée d’une telle satiété, comme si j’avais mangé les œufs, le fromage et toute la viande du monde. Je ne sais combien de temps je suis demeurée en cet état. Les paroles se frayaient un chemin jusque dans mon âme. J’entendis cette merveilleuse voix tout au long de l’office pascal. Ces mots de l’Évangile me procuraient une telle satisfaction ! Je pensai alors : ‘cela doit ressembler à la satiété dont faisaient l’expérience les Pères du désert, qui ne mangeaient rien’... J’étais épuisée par le jeûne complet et les privations de la Grande Semaine, et pourtant, une force arrivait en moi. Je me sentis très costaude. Au moment où le père me dit «Le Christ est ressuscité!», je ressentis en mon âme une richesse spirituelle plus grande encore. Lorsque je communiai, cette satiété atteignit une limite extrême. Je rentrai à la maison. Lorsque j’y fus, j’étais incapable de manger ou boire quoi que ce soit. Mes cousins m’invitèrent chez eux, pour rompre le jeûne, mais comment aurais-je pu leur expliquer que j’avais déjà ‘mangé’? J’y allai mais je ne pus absorber la moindre cuillerée… Il dit en vérité dans l’Évangile que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de la grâce de Dieu. Pour la Gloire du Christ, je vous dis que j’ai ressenti la grâce du Christ ôter ma faim, mes souffrances et mon dénuement. Dieu m’accorda de comprendre ce à quoi conduisent de telles épreuves. Combien de bienfaits la continence et la prière n’apportent-elles pas à l’homme !»
gerondissa-makrina-geronda-ephrem-fraterniteGeronda Ephrem se rappelle les circonstances dans lesquelles sa propre mère (la future moniale Theophano) rencontra Maria Vassoloulou, et comment naquit une petite communauté de femmes à Volos : «A cette époque, Maria rencontra ma juste mère. Ces saintes âmes priaient ensemble dans notre cuisine, à genoux toute la soirée, versant des larmes et faisant des grandes métanies. Leur saint exemple m’inspira beaucoup. Grâce aux vertus de Maria quelques bonnes jeunes filles s’assemblèrent autour d’elle dès la période de l’occupation, souhaitant devenir des fiancées du Christ». Le Père Ephrem (Karaiannis) parla de Geronda Joseph l’Hésychaste à cette communauté, ainsi que de ses instructions et conseils spirituels.  Quand en 1952, le Père Ephrem (Karaiannis) se rendit à la Sainte Montagne, il emmena une lettre de la communauté, adressée à Geronda Joseph. Les membres de la communauté y expliquaient qu’elles avaient appris son existence par l’intermédiaire de son fils spirituel, le Père Ephrem et lui demandaient de les recevoir elles aussi parmi ses enfants spirituels.
Geronda Ephrem de Philotheou et d’Arizona se rappelle : «A cette époque, j’étais déjà à la Sainte Montagne, auprès de Geronda Joseph l’Hésychaste. Geronda leur répondit :’Si vous acceptez de m’obéir, je vous recevrai, sinon, je ne m’occuperai pas de vous’. Elles répondirent : ‘Père, nous obéirons à tout ce que vous nous commanderez’. Alors, Geronda leur ordonna d’obéir à Maria, alors qu’il n’avait jamais rencontré ni vu celle-ci de toute sa vie. Il expliqua les raisons de cette instruction : ‘Obéissez à Maria car ce soir pendant que j’étais en prière, je l’ai vue.  Dans cette vision, je vis de nombreuses brebis autour d’elle, qui se tenait en leur milieu. J’ai compris que je devais en faire votre Gerondissa. Écoutez donc Maria, et qu’aucune d’entre vous ne la contredise’. Elles répondirent ‘Que cela soit béni’. Et Geronda se réjouit de leur obéissance».
Lorsque Maria apprit l’instruction de Geronda Joseph, elle eut peur de devenir la supérieure de la communauté et de prendre sur elle la responsabilité de la vie spirituelle des sœurs. Elle était en effet l’une des plus jeunes de la communauté. Alors, Geronda pria et Maria eut une vision : elle vit une multitude de moines et moniales monter au ciel. A leur tête marchait le Saint Précurseur muni d’un saint bâton. Soudain, le saint se tourna vers la jeune fille et lui remit son bâton, symbole de son autorité d’higoumène. Une des moniales témoigna du lien spirituel intime entre les sœurs et Geronda Joseph l’Hésychaste. Elle se souvenait d’une époque où Maria, qui avait alors déjà reçu la tonsure monastique et était devenue Gerondissa Makrina, tomba sérieusement malade et se mit à tousser du sang. «Nous n’avions pas de téléphone pour prévenir Geronda. Nous devions lui adresser des lettres à toute occasion. Mais nous n’avions pas mentionné cela dans nos lettres, nous le lui avions caché. Nous ne souhaitions pas l’importuner et le distraire de ses prières. Il nous écrivit ceci ‘Mes enfants, pourquoi ne m’avez-vous pas écrit que Gerondissa est malade et souffre, afin que je prie pour elle ? Vous avez mal agit en décidant que cela m’aurait distrait de mes prières. Car nous l’avons tout de même vue ce soir, mentalement, pendant que nous priions avec Geronda Arsenios. Nous avons constaté que Gerondissa Makrina est sérieusement malade et nous avons ardemment prié pour elle. Mes enfants, je veux que vous m’informiez de tout ce qui se passe dans le monastère, et en particulier ce qui arrive à Gerondissa. Ecrivez-moi’. Mais Gerondissa elle-même les vit ce soir-là, à côté de son lit, Geronda Joseph et Geronda Arsenios, priant avec leur komboschinis en faisant des signes de croix et priant «Seigneur, guéris Ta servante ! ». Cela se produisit souvent. Quand Geronda Joseph et Geronda Arsenios priaient, ils voyaient ce qui se passait au monastère et comment nous nous en sortions».
gerondissa-makrina-nbAvant qu’il ne s’endorme, en 1959, Geronda Joseph l’Hésychaste plaça les sœurs sous la guidance de Geronda Ephrem, devenu entre-temps Ephrem de Philotheou et d’Arizona. Geronda Ephrem se mit à veiller sur les sœurs. Celles-ci acquirent une parcelle de terrain dans le village de Portaria, à proximité de Volos et elles y installèrent leur monastère. Alexandra Lagos, une fille spirituelle de Geronda Ephrem rapporte ceci : «Geronda Joseph savait, de son vivant, que son novice Ephrem devrait à un certain moment reprendre la tâche de pasteur de cette communauté bénie. Il lui remit un jour une lettre des sœurs et la lui fit lire, afin d’instaurer déjà une connexion avec les sœurs. Bien entendu les sœurs connaissaient Geronda Ephrem depuis l’époque où il vivait encore dans le monde. Après la dormition de Geronda Joseph, Geronda Ephrem quitta le Mont Athos pour la première fois, afin de rencontrer cette communauté, dont sa propre mère était membre. Son père était décédé, et après le décès, sa mère avait rejoint la communauté des sœurs. Gerondissa et les autres sœurs étaient présentes lorsqu’il arriva. A son arrivée, sa mère ne le reconnut pas. Tant d’années s’étaient écoulées depuis que le jeune homme imberbe de dix-neuf ans avait quitté la maison paternelle. Ses exploits ascétiques et les difficultés de la vie sur la Sainte Montagne avaient fortement modifié son apparence. De plus, il se tenait au milieu d’elle en qualité de hiéromoine et il était alors d’usage en Grèce que les femmes ne regardent pas un moine en face. La mère de Geronda était assise parmi les autres moniales, la tête inclinée, ne devinant pas que celui qui se tenait devant elles était son fils. Mais dès qu’elle comprit avec qui elle parlait, l’expression de son visage changea et elle dit d’une voix sévère : ‘Qu’est-ce que cela signifie ? Pourquoi as-tu quitté la Sainte Montagne ?‘ Aucun ‘bonjour mon cher fils’ ou ‘permets-moi de te regarder‘ ou encore ‘comment va ta santé?’. Elle se calma après seulement qu’on lui eut expliqué qu’il remplissait maintenant les obligations de Geronda Joseph. Voilà l’éducation que Geronda Ephrem reçut de sa mère bénie».
La première tonsure accomplie par Geronda Ephrem dans la communauté de Volos fut celle de sa mère, en 1963. Il lui donna pour nom Theophano. La seconde tonsure fut pour Gerondissa Makrina (en 1963 également). Et Gerondissa Theophano devint le bras droit de Gerondissa Makrina. Celle-ci avait toujours considéré Gerondissa Theophano comme sa mère spirituelle et lui obéissait en tout. Elles partageaient la même cellule, comme une mère et sa fille. La mère de Geronda Ephrem n’avait pas eu de fille, seulement trois fils, et Gerondissa Makrina fut pour elle comme sa propre fille. Pendant les premières années, Geronda Ephrem quittait souvent le Mont Athos et venait séjourner à Portaria, quelques jours, parfois un mois, et une seule fois, plus longtemps. Il guidait les sœurs dans la pratique de la prière de Jésus, et elles atteignaient régulièrement des états spirituels élevés. Ainsi, les moniales de Portaria reçurent un enseignement spirituel unique, de même qu’une aide inestimable de la part de Geronda Ephrem et Gerondissa Makrina, qui était une sainte femme, ainsi que de Gerondissa Theophano, la maman de Geronda Ephrem. L’higoumène Makrina et ses sœurs récoltèrent de grands succès spirituels. L’Archimandrite Sophrony (Sakharov) disait de Gerondissa Makrina : «Elle est un titan de l’esprit!». A de nombreuses reprises, Geronda Ephrem de Katounakia voyait durant ses vigiles nocturnes deux piliers de feu s’élever de Volos et monter de la terre jusqu’au ciel, symboles de Gerondissa Makrina et d’une autre de ses moniales. Et Geronda Ephrem disait alors, en se réjouissant : «C’est merveilleux! Nous ici, nous peinons tellement, isolés sur nos rochers, pour récolter quelques miettes, alors que dans le monde, elles ont acquis une telle grâce!». Il disait également de Gerondissa qu’elle «avait atteint le même niveau spirituel que Geronda Joseph l’Hésychaste».
gerondissa-makrina-livreAthanasios Krallis, de Skolari, en Grèce, se rappelle : «Un jour, un bus rempli de pèlerins arriva au monastère. Mais dans la cuisine, il restait juste un paquet de riz. Gerondissa Makrina dit aux sœurs de préparer ce riz afin de nourrir les hôtes. Les moniales s’exclamèrent : ‘Gerondissa c’est notre tout dernier paquet, il ne restera rien pour nous’. Mais Gerondissa insista :’Préparez ce riz pour nos invités. La Panagia s’occupera de nous’. Les moniales obéirent et offrirent un repas aux hôtes. Dès que ceux-ci furent partis, un homme se présenta au monastère ; il venait offrir un énorme sac de riz. Elle avait une telle foi en Dieu, un tel amour pour le gens, pour tous les gens!»
Stavros Kourousi, professeur de philologie byzantine à l’Université d’Athènes, apporte lui aussi son témoignage à propos de Gerondissa Makrina : «Quand on lui parlait, on voyait sur son visage les vertus de la chasteté, de la pureté, de l’humilité, de l’obéissance, du dépouillement et d’un amour infini pour Dieu et pour son prochain, pas seulement pour ses moniales, mais pour tous ceux et celles qui venaient quémander un soutien spirituel ou matériel. Elle était constamment en prière et en communion avec Dieu et les saints. C’est ainsi qu’elle recevait en permanence l’aide nécessaire pour faire face aux tentations qui survenaient au cours de son labeur consistant à nourrir les âmes qui lui avaient été confiées.
Gerondissa Fevronia du Monastère de Saint Jean le Précurseur à Serès, en Grèce, se souvient de Gerondissa Makrina : «Parmi toutes les choses terrestres, elle aimait surtout les fleurs et la nature, mais bien sûr elle préférait les choses de l’esprit. Elle passait ainsi des beautés terrestres aux dons divins, dont elle jouissait en sa vie ici-bas. Les choses du Ciel représentaient son centre d’intérêt particulier. Dans sa contemplation, elle était transportée de cette vie vers l’autre. Sans cesse elle s’élevait de la terre vers le Ciel».
Gerondissa Markella raconte l’histoire suivante : «Un jour, je suis allée dans sa cellule pendant qu’elle dormait. Comme je ne savais pas si elle était endormie ou éveillée, je suis entrée en faisant le moins de bruit possible afin de ne pas la déranger. Je tournai lentement la poignée de la porte, et celle-ci s’ouvrit. Je vis Gerondissa. Elle dormait, mais en même temps, sa main égrenait les nœuds de son komboschini. Elle priait alors qu’elle était dans une phase de sommeil profond. Jamais je n’avais vu une chose pareille. Bien sûr, on dit que la prière du cœur se poursuit même pendant le sommeil. Mais en égrenant les nœuds du komboschini…?» Les moniales Agnia et Parthenia du Monastère du Saint Jean le Précurseur  à Goldendale, aux États-Unis offrent leur témoignage : «Elle ne parvenait pas à être stricte envers nous. Cela ne fonctionnait pas, tout simplement. Elle était elle-même très sensible, délicate, et elle sentait qu’elle devait demeurer ainsi envers nous. Quand elle voulait faire une remarque à quelqu’un, elle l’appelait toujours en utilisant un diminutif affectueux. Elle était si gentille, très douce. Parfois, pour adoucir un reproche, elle recourait à une forme plurielle. Elle voulait que nous comprenions nous-mêmes l’erreur que nous avions commise, comment nous nous étions fourvoyées. Elle était très… comment dire… dans ses conversations, elle rappelait toujours qu’il est nécessaire de toucher l’âme de l’autre personne légèrement, avec douceur, comme avec une plume. Et c’est exactement de cette façon qu’elle touchait nos âmes».
gerondissa-makrina-jardinGeorges Lagos, professeur de médecine neurologique à l’Université de Ioannina, en Grèce dit à son tour : «Dans l’Orthodoxie, l’essentiel, c’est de vivre l’Orthodoxie. Notre foi et notre relation à Dieu sont vivantes ; elles sont acquises par notre expérience. Les saints vivent une expérience plus intense, à un degré supérieur. Ayant réalisé cette expérience, ils nous parlent de Dieu, de la Sainte Trinité, et des dogmes de l’Église. Les saints sont ceux qui vivent l’Orthodoxie et en font l’expérience. Gerondissa Makrina fut une des leurs. Nous avons vu de si nombreux miracles accomplis par Gerondissa Makrina. Elle nous donna de l’aide,… une énorme assistance spirituelle… Je puis affirmer avoir vu et ressenti la sainteté de Gerondissa Makrina et un soutien spirituel immense. Elle fut ma mère spirituelle. Même après son décès, j’ai continué à sentir son aide et l’intercession de ses prières incessantes».
La moniale Thetekna du Monastère Saint Étienne des Météores se rappelle : «Sur base de mes quarante-cinq années d’expérience de la vie monastique, je puis dire qu’elle fut une des moniales les plus remarquables de Grèce. Elle fut une grande ascète. Ses conseils ont aidé non seulement les moniales, mais tant de laïcs. Même de nombreux moines de la Sainte Montagne se tournaient vers elle pour recevoir ses conseils. C’était une femme grande et majestueuse, à l’aspect imposant, au visage lumineux. Dès que vous l’aperceviez, dès le premier instant, vous compreniez qu’avec elle, il fallait parler sérieusement, parler des problèmes importants de la vie. Elle était instruite des choses divines, elle connaissait bien la vie des saints, le Synaxaire, ainsi que les paroles des Pères du Désert. Bien qu’elle ne suivit aucun enseignement séculier, bien qu’elle n’ait eu aucun diplôme universitaire, par la grâce du Saint Esprit, elle avait le don de la parole spirituelle. Vous pouviez parler avec elle des heures durant. Elle parvenait à édifier n’importe quel visiteur, et en particulier ceux qui aspiraient à l’amour du Christ».
gerondissa-makrina-pigeonGerondissa Makrina s’endormit le 22 mai/4 juin 1995, pendant la semaine de Tous les Saints. Pendant les quelques jours qui précédèrent sa mort, elle voyait constamment la Panagia dans sa cellule. Quelques moniales quittèrent le monastère, pour en raviver d’autres en Grèce, et des moniales de ces monastères furent à leur tour envoyées aux États-Unis. Geronda Ephrem a toujours voulu peupler de moniales de Portaria ces nouveaux monastères, car ces moniales étaient allées à une école spirituelle unique et possédaient ainsi une solide expérience spirituelle.

Paroles de Gerondissa Makrina

 Les paroles oiseuses sont comme du feu.
Nous devons fuir les propos oiseux car ils sont tel un feu, disent les saints Pères. De la même façon que l’on voit parfois des forêts entières brûler et conférant aux montagnes un aspect dénudé, les paroles oiseuses vident nos âmes de tout ce qui est bon, elles l’expulsent hors de nos cœurs, et l’homme devient aussi inutile qu’une boîte de conserve rouillée.
Celui qui se faufile à l’avant, le Christ le tirera vers l’arrière.
Nos intentions doivent être bien claires ; nous devons être convaincus que pour pouvoir être sauvé, nous devons devenir le dernier de tous. Celui qui se faufile vers l’avant, le Christ le tirera vers l’arrière, mais celui qui se met derrière tout le monde sera emmené à l’avant.

Quand vous voyez votre frère, vous voyez le Christ Lui-même.
Nous devons être attentifs à notre mode de vie, nos habitudes, la façon dont nous communiquons avec ceux qui nous entourent. Quelle importance cela revêt ! Quand vous voyez votre frère, vous voyez le Christ Lui-même ! C’est pourquoi les saints Pères faisaient preuve de tant d’amour et de compassion.

A propos du souvenir de la mort.
Après sa dormition, Gerondissa Makrina apparut à l’une de ses filles spirituelles et lui dit : «J’aimerais dire à ceux qui sont sur terre qu’il leur sera demandé compte de toutes leurs actions, ils devront en rendre compte après leur mort!».
Sur la pureté.
Ceux des jeunes qui préservent leur pureté auront dans leur vie future la grâce des vieux confesseurs.

Sur la patience.
La grâce de la patience est la plus puissante de toutes car elle est le fondement de toutes les autres vertus.

Sur la charité.
La prière pour les défunts est la charité la plus grande.

La prière est le plus grand don de Dieu.
Quand quelqu’un a la prière, l’Esprit Saint est actif en son âme, c’est -à-dire qu’il héberge l’Esprit Saint. Remarquez comme on dit souvent à propos de ceux qui ont acquis la prière mentale : «Quel homme! Son visage resplendit!». La prière est une œuvre miraculeuse. Elle est le plus grand don de Dieu, et lorsque l’amour de Dieu vient à l’homme pendant sa prière, c’est comme s’il se baignait dans cet amour. Si nous acquérons la prière, la lumière apparaîtra dans notre âme, ainsi qu’une forme de protection, car Dieu ne nous abandonne pas ; Il nous couvrira de Sa protection. Quand on progresse dans la prière, on comprend certains états que l’on ne pouvait pas même imaginer auparavant. C’est comme si on avançait toujours plus profondément dans la lumière éternelle, tout en se voyant comme de l’intérieur de nous-même. Tout cela arrive suite à une obéissance parfaite et à l’humilité, à une grande précision, évitant de se dire «Ce n’est pas grave, ne nous inquiétons pas. Ne nous soucions pas des choses petites et insignifiantes».

Quand l’âme s’humilie arrive la pureté de l’esprit, les pensées élevées et la béatitude.
Lorsque l’âme s’humilie vient la dévotion, l’amour, le respect, le rejet des pensées et des jugements. L’âme voit le tellement grand amour que le Christ a pour elle, qu’elle n’en remarque plus les fautes d’autrui. «Il m’aime tant, prend tellement bien soin de moi, Il m’embellit des pieds à la tête et me tiens dans Ses bras! Comment ne pas être reconnaissant?». Se purifiant pas les larmes, après lesquelles arrive la pureté de l’esprit, l’homme ne peut déjà plus adopter un comportement agressif ou exprimer des propos inconvenants. Quand nos vêtement deviennent sales, ne les trempons-nous pas dans l’eau, ne les lavons-nous pas au savon à l’aide d’une brosse ? Nous devrions agir de la sorte avec nous-même ; alors nous resplendirions de joie et d’aise.
Comment dès lors ne pas céder aux larmes, comment ne pas s’empresser d’accéder à la béatitude et aux pensées élevées ? Quand on y a goûté une fois,  on s’efforce de toute sa volonté de se surveiller soi-même, et cette attention amène la prière. On commence par exemple par s’abstenir de toutes vaines paroles et récriminations, quoiqu’en tant qu’humains, nous pécherons encore parfois. Mais il faut essayer de remarquer immédiatement chacune de nos chutes. Dès que nous remarquons que nous venons de décevoir le Christ, disons-Lui immédiatement : «Pardonne-moi!» Et quand une des soeurs nous déçoit ? La première chose consiste à dire «Bénis» et «Pardonne», avec une métanie au Christ et à notre voisine.

Le Christ attend notre foi.
Est-ce si dur que d’aimer le Christ? Non, bien sûr! C’est facile à faire. Beaucoup de gens Lui tendent les mains, comme ceci, avec leurs vraies mains, car leur foi est grande. Et elles Lui parlent de leur souffrance, du poids qui pèse sur leur âme, de la même façon que si elles parlaient avec d’autres gens qu’elles connaissent et qu’elles peuvent interroger. Ne parlez pas froidement, ne doutez pas de ce que vous recevrez ce que vous avez demandé. «Christ, fais ceci pour moi. Que je le veuille ou non, guide-moi jusqu’au Paradis». Le Christ n’aime pas la tiédeur. Il rejette la tiédeur. Le Christ attend notre foi.gerondissa-makrina-tombe
Source.
Traduit du russe

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