A l’instar de tous les horizons de Russie, de nombreux saints et bienheureux ont en leur temps mené leur podvig à Saint-Pétersbourg et dans sa région. On se souviendra sûrement de la Bienheureuse Xénia, de Saint Jean de Kronstadt et de Saint Seraphim de Vyritsa, mais une myriade d’autres saints justes et moines leur tiennent compagnie dans ce coin de Ciel de notre Église Triomphante. Il en est ainsi de la Bienheureuse Lioubouchka. Comme Sainte Xénia, elle mena le podvig de folle-en-Christ, et de plus, elle fut aussi pendant des décennies, le pivot d’un intense vie spirituelle dans la région, mais s’étendant aussi jusqu’à la Laure de la Trinité Saint Serge. En effet, le Starets Naum (Baiborodine) de bienheureuse mémoire envoyait régulièrement ses propres enfants spirituels auprès de la Staritsa de Sousanino, à proximité de Vyritsa, pour y recueillir sa bénédiction et ses conseils. Plusieurs livres ont été écrits à son sujet. Le texte ci-dessous est la suite de la traduction d’un site internet, dont le début se trouve ici.

Entretien avec Lucie Ivanovna Mironov, moniale Kyrilla, auxiliaire de cellule de la Bienheureuse Lioubouchka
Le 30 septembre est le jour de l’ange de la Staritsa Lioubouchka. Dieu voulut que ses parents la nomment, elle la cadette, Lioubov [Amour. N.d.T.], alors qu’elle vint au monde le 17 septembre 1912, deux semaines avant son jour de l’ange. Le jour de la fête onomastique de Lioubouchka, jour où nous fêtons les saintes martyres Foi, Espérance, Amour et leur mère Sophie, nous étions assises autour de la table dans la maison de Lucie Ivanovna Mironov, qui chemina pendant de longues années aux côtés de Lioubouchka. Nous buvions du thé accompagné de petits gâteaux, et nous nous souvenions de la Bienheureuse. La maison était spacieuse et lumineuse, achetée récemment avec la bénédiction et les prières de la Bienheureuse Staritsa. Dans un coin, une énorme icône ancienne de Saint Nicolas, achetée avec la maison. Selon notre hôtesse, Lioubouchka vénérait particulièrement Saint Nicolas le Thaumaturge. A Sousanino, elle le priait avec ferveur devant une ancienne icône (Cette icône fut offerte au Monastère, pour hommes, Saint Cyrille du Lac Blanc). Pendant 22 ans la Bienheureuse vécut dans la maison de Lucie Ivanovna Mironov.Lioubouchka est arrivée chez nous à la fête des Saints Apôtres pierre et Paul, se souvient Lucie Ivanovna, en 1974. Nous vivions alors à Vyritsa. Nous avions rencontré Lioubouchka dans la rue. Et avant cela, je l’avait vue dans l’église; elle était déjà considérée comme clairvoyante. Lioubouchka m’a demandé où j’habitais et m’a demandé de pouvoir loger la nuit. Je lui ai dit alors que j’étais pécheresse et indigne, mais que je serais ravie. Seulement mes petits-enfants étaient encore tout petits…
Je ne crains pas les enfants, répondit Lioubouchka. Quand nous sommes rentrées à la maison, Galina allaitait Pavlik. J’occupais alors une chambre dans un appartement communal. Et pour l’été, Galina venait me voir avec son mari et ses deux jeunes enfants.
La première chose que Lioubouchka me dit quand nous sommes entrées fut : «Tu vis ici. Et je vais vivre ici maintenant…». Nous lui avons donné un lit pliant, il n’y avait pas d’autre possibilité. C’est ainsi qu’elle s’est installée dans notre maison. Des vielles qui vivaient seules demandaient qu’elle vienne chez elles, mais Lioubouchka refusa pour une raison qu’elle seule connaissait, disant qu’elle resterait chez elle, c’est-à-dire chez nous.
Je me souviens qu’un an plus tard, elle m’a dit: «Lucie, viens, nous irons errer ensemble».
«Lioubouchka, ce n’est plus une époque pour cela, maintenant il y a beaucoup de hooliganisme, où irons-nous? Restons ici et vivons dans la maison, l’église est toute proche.»
«D’accord, je vivrai chez toi…»
A deux reprises, elle me demanda de partir errer. Elle était arrivée chez nous avec un sac à main, où il y avait une paire de linge de corps et un morceau de pain, aux pieds, des pantoufles. Un pèlerin lui avait donné une nouvelle veste avec une doublure. J’en avais une pareille, mais déjà usagée. Elle me dit soudain : «Lucie, échangeons nos vestes, je veux porter la tienne.» Nous avons échangé. Avec la bénédiction de Lioubouchka, nous avons acheté une maison à Sousanino, à côté de l’église de l’icône de la Très Sainte Mère de Dieu de Kazan, qu’elle honorait particulièrement. Elle nous avait prédit cet achat trois ans à l’avance. Lioubouchka priait beaucoup, surtout la nuit. Elle connaissait beaucoup d’acathistes par cœur.

Sousanino, église

À Sousanino, les gens ont commencé à s’adresser de plus en plus à elle, surtout lorsqu’ils rencontraient des difficultés, des afflictions. Elle priait pour tous ceux qui s’adressaient à elle et leur disait la volonté de Dieu, qui lui était révélée. En la lisant le plus souvent dans sa main, comme si elle ouvrait le livre de vie, mais aussi par la prière, bien sûr, qui, montait jusqu’à Dieu. Nombreux furent ceux que Lioubouchka envoya prier le Saint et Juste Jean de Kronstadt au Monastère de la Karpovka, ou Sainte Xénia. Elle les vénérait grandement. (…)
Lioubouchka priait de manière inhabituelle et touchante. Tant à l’église qu’à la maison, elle parlait aux icônes dans sa langue, s’adressant à celui ou celle qui était représenté(e) sur l’icône comme à quelqu’un de vivant. Parfois, elle demandait quelque chose en larmes, parfois elle se réjouissait.
Elle priait pour tous ceux qui s’adressaient à elle, elle priait pour Saint-Pétersbourg, pour la Russie. Une fois, elle a dit que si les gens continuaient à pécher et ne se repentaient pas de leurs péchés, un moment terrible allait survenir. Elle vénérait particulièrement la Très Sainte Mère de Dieu. Lioubouchka, l’orpheline, L’aimait de tout son cœur, de toute son âme, comme sa propre mère. Et aussi, dans une simplicité cordiale, elle Lui parlait à sa façon. Lioubouchka m’a dit que la Reine du Ciel était venue à elle à plusieurs reprises. C’est à Vyritsa qu’elle me parla de cela pour la première fois.
Un jour, Lioubouchka priait sur la route, près de l’église. Et elle vit comme une meute de loups, ils étaient tous noirs, effrayants et fonçaient vers elle. C’étaient des démons. Quelques jours plus tard, à ce même endroit, au bord de la route, elle vit sur un pin la Reine du Ciel elle-même, vêtue d’une belle robe bleue… Un jour, elle se tenait en prière près de l’église, et tout à coup elle vit la Très Sainte Mère de Dieu tout près, à quelques pas. La Reine du Ciel sortit littéralement de l’icône. Elle se tenait debout et regardait Lioubouchka, la bien-aimée de Dieu. Elle la réconforta par son apparition. Une fois à Sousanino, j’ai demandé à Lioubouchka si je serais sauvée et comment me sauver.
Tu iras à l’église et tu seras sauvée, répondit la Bienheureuse. Nous considérerons que c’est une instruction valable pour nous tous, pour tous ceux qui cherchent à sauver leur âme.

Le 11 septembre, jour de la décollation du chef de Jean le Baptiste à 11 heures, on lui donna la Communion. Elle demeura consciente et pria jusqu’à la Dernière minute. Une demi-heure avant sa mort, son visage a commencé à s’éclairer. En voyant ses derniers moments de vie sur terre, je me sentais mal à l’aise à cause de ma vie négligente et parce qu’il n’y avait personne d’autre dans la kelia, et que j’étais seule à voir la fin bienheureuse de la grande servante de Dieu. J’ai commencé à lire le canon sur la séparation de l’âme, puis Lioubouchka a soupiré trois fois doucement et a livré son âme de juste au Seigneur. Immédiatement, un sourire bienheureux s’est imprimé sur son visage. Elle avait dit de son vivant que la Très Sainte Mère de Dieu Kazan Elle-même viendrait la chercher dans une robe blanche.
La bienheureuse Staritsa Lioubov fut enterrée le samedi 13 septembre 1997 près de l’église de Kazan, à hauteur du côté droit de l’autel.
Et le lendemain, le 14 septembre, le 1er septembre selon l’ancien style, commence la nouvelle année liturgique. Ce n’est que ce jour-là que je compris, indigne, pourquoi elle m’avait dit d’endurer tout l’été, il s’avère que cela signifiait tout l’été de l’Église. Elle vint chez nous, sachant déjà jour de sa fin… Nous, ses enfants spirituels, nous croyons que devant le Trône de la Gloire du Seigneur, la Bienheureuse Staritsa Lioubouchka ne nous abandonnera pas, nous les orphelins, et va prier encore plus pour la renaissance du saint Monastère de la Très Sainte Mère de Dieu de Kazan et pour tous ceux avec qui elle a vécu et mené son podvig et, bien sûr, pour l’ensemble de notre pauvre Russie qui a tant souffert et pour son peuple. Nous espérons qu’avec l’aide de Dieu et avec le temps, un livre sera écrit sur tous les podvigs et miracles de la grande héroïne de l’ascèse et notre avocate, la Bienheureuse Staritsa Lioubov. Éternelle et bienheureuse mémoire!»

La chapelle de Lioubouchka est située à côté de l’église de Kazan. Celui qui a vu cette église s’émerveille devant sa taille imposante. Mais ce qui est encore plus étonnant, c’est qu’elle a été restaurée en seulement un an. Et personne dans le monastère ne doute que cela a été possible par les prières de la Bienheureuse Lioubouchka.
«Je pense que beaucoup pourraient parler de la même façon, dont dans toute la Russie, églises et monastères ont été restaurés par la bénédiction de Lioubouchka, par ses prières. Comme on dit, presque tous les monastères de femmes qui renaissent maintenant, «c’est Lioubouchka qui les a plantés». Elle fut la mère spirituelle de ces higoumènes alors qu’elle était en vie, et aussi de nombreux moines, moniales et prêtres à travers tout le pays».
Au nom de l’Higoumène Théodora arrivent des lettres, où les gens racontent leurs rencontres avec la Bienheureuse Lioubouchka, demandant de leur envoyer une photo de la Staritsa, et commandent des pannychides sur sa tombe.
Traduit du russe
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