Le texte ci-dessous est la dernière partie de la traduction d’un article original rédigé en mémoire du Père Hiérodiacre Héliodore (Gaïriants)par Madame Olga Rojniova et publié sur le portail Pravoslavie.ru le 10 novembre 2020. Le texte propose cette introduction : Mes amis, notre cher Père Héliodore s’en est allé. Il est parti le 26 octobre, fête de la Très Sainte Mère de Dieu d’Iviron, alors que retentissent devant le trône de Dieu les paroles d’action de grâce à Celle Qu’il aima et vénéra tant au cours de toute sa vie monastique : Réjouis-Toi, bonne Gardienne de la Porte, Qui ouvre la porte du paradis aux fidèles !
Le neuvième jour est déjà là et tous nous avons l’impression, en arrivant à Optino, que le Père Héliodore est là, qu’il lit l’acathiste, proclame les louanges à la Très Sainte Mère de Dieu, entouré, comme d’habitude par les pèlerins, par ses enfants spirituels… Souvenons-nous de lui.

Au Désert d’Optino

Et George se retrouva à Optino en 1989. En 1990, il reçut la tonsure monastique des mains de l’archimandrite Euloge (Smirnov, futur métropolite de Vladimir et de Souzdal; 1937-2020) et le nom de Théophile, «qui aime Dieu». Sa première obédience fut d’assister l’économe. La même année, lors de l’Entrée au Temple de la Très Sainte Mère de Dieu, il fut ordonné hiérodiacre par le Patriarche Alexis II. En 1994, lors de la fête de l’Annonciation, il reçut le schème en l’honneur du Saint Hiéromartyre Héliodore de Magydos (en Pamphylie) des mains de l’Archimandrite Benedikt (Penkov; 1939-2018), supérieur du Désert d’Optino.(Le Saint hiéromartyr Héliodore vécut dans la ville de Magydos, en Pamphylie, sous le règne de l’Empereur Aurélien. Il fut martyrisé pour sa confession de la foi du Christ et fut exécuté en 273.)

Comment le Père Héliodore débarrassa sa cellule de tout le superflu. (Histoire contée par le Père Dimitri Torchine)

Je célèbre à l’église de l’Assomption dans le village d’Ozerski, près du Désert d’Optina. Quand je suis arrivé à la paroisse, avec Matouchka, il s’est avéré que nous ne trouvions aucun endroit pour y vivre. Il avait une maison paroissiale, mais elle était inachevée. Par conséquent, dans les premiers temps, nous avons loué un appartement. Je me souviens que le premier mois, j’attendais de mon premier salaire, et à la fin du mois, le trésorier m’a dit que nous devions payer 30 000 roubles pour l’électricité et les taxes, donc non seulement il n’était pas question de salaire, mais je devais trouver ces 30 000 roubles pour pouvoir continuer à célébrer dans notre église. Après quelques mois, j’ai commencé à aménager une pièce dans la maison paroissiale, où il n’y avait alors que les murs.Une de ceux qui me sont les plus chers à Optino, c’est le Père Héliodore. Il me connaît depuis mon enfance, dès le moment où mes parents m’ont amené à Optino et m’ont fait baptiser.
Le Père Héliodore fut le seul, pendant toute ma vie, qui pouvait me téléphoner et demander: «Père Dimitri, comment vas-tu, comment vis-tu, As-tu de quoi manger?» Moi: «Mais oui, tout va bien», et lui de répondre: «Ouvre le réfrigérateur, qu’est-ce que tu as là?» Il me faisait énumérer ce que j’avais pour s’assurer que nous ne mourions pas de faim. Et ce n’était pas seulement avec moi, il prenait soin de tout le monde. Il y eut un cas où quelqu’un vécut une situation très difficile, et il se déplaça, il vit, et prit soin paternellement de cet homme.
Je suis donc allé voir le Père Héliodore pour lui demander ses prières et son aide. Il se mit à appeler avec humilité tous les numéros enregistrés dans son téléphone pour demander de l’aide pour moi. Mais tous répondirent qu’ils n’en avaient pas la possibilité à ce moment-là; plus tard peut-être. Alors Père Héliodore vint avec moi à la paroisse, a regardé dans quelle pièce de la maison paroissiale je pourrais commencer à vivre, et il m’offrit des meubles: un canapé, une table et des chaises. Comme je lui avait déjà rendu visite dans sa cellule, je me suis immédiatement rendu compte qu’il voulait me transférer tout ce qui se trouvait dans sa propre cellule, même le canapé qu’il avait reçu tout récemment, car aupavant, il n’en avait pas.
J’ai commencé par refuser, mais le lendemain, tout cela me fut apporté, et le chauffeur me dit avec le sourire qu’aujourd’hui, le Père Héliodore avait mis de l’ordre dans sa cellule et avait décidé de se débarrasser de tout le superflu.

«Un Père spirituel» récit conté par l’Higoumène Siméon du Monastère de la Dormition de la Très Sainte Mère de Dieu de Sviajsk, ancien moine du Désert d’Optino.
Pendant 30 ans, le Père Héliodore a mené un podvig dont il n’y a guère d’exemples dans l’Église: il s’est donné tout entier au service de milliers et de milliers de pèlerins, venus du monde entier à Optino. Et je le répète, il n’y a guère d’exemples de moines hiérodiacres devenus guides spirituels d’un très grand nombre de chrétiens orthodoxes, prêtres, moines et laïcs.
Le Père Héliodore consacra toute sa vie, ses forces et ses capacités à ce ministère. Jamais, il ne demeurait inactif ou s’occupait de lui-même; ainsi, il ne savait pas ce qu’était le découragement. Il ne dormait pratiquement jamais. Pendant de nombreuses années, cela surprenait ses voisins.
Le matin, à 5h30 du matin, malgré qu’il n’était déjà plus un jeune moine, il participait au moleben de la communauté devant les reliques du Saint Starets Ambroise d’Optino. Sans exception, il concélébrait la Liturgie dans l’une des églises du monastère. Après cela, il était déjà attendu par les gens venus pour communier spirituellement avec lui. Avec ses enfants spirituels, il faisait le tour de toutes les saintes reliques et icônes d’Optino, il travaillait à la fabrication des prosphores, visitait les monastères voisins de Chamordino et Klykovo. Après l’office du soir à l’église, il ne manquait jamais de chanter «Agni Parthene». Tard dans la nuit, le Père Héliodore finissait sa journée en chantant l’acathiste dans la chapelle des trois moines martyrs assassinés la nuit de Pâques à Optino. De retour dans sa cellule, il se reposait un peu dans un fauteuil, car son lit était toujours rempli de livres, d’icônes, de bonbons, consolations spirituelles et corporelles pour les pèlerins. Et tôt le matin, sa journée recommençait, remplie de prière, de joie et de travail.
Ses instructions se distinguaient par leurs qualités d’amour, de sagesse et d’un subtil sens de l’humour. Sans pitié pour lui-même, il était plus que condescendant envers son prochain, et beaucoup l’appréciaient. Mais ses dons spirituels, ainsi que son intelligence et son érudition étonnantes, souvent cachés derrière la folie-en-Christ, lui permettaient de voir profondément l’état des âmes et de donner de bonnes instructions.
La vie monastique est organisée selon une règle stricte et, par obéissance, je devais parfois faire une remarque au starets. Bien sûr, il a toujours accepté cela avec humilité et parfois il s’agenouillait pour demander pardon. Ses enfants spirituels contribuèrent largement à l’abondance des victuailles au réfectoire communautaire du monastère.
Et le Père Héliodore demandait la permission, après la Liturgie du dimanche, de pouvoir les nourrir au déjeuner. Ayant reçu la bénédiction à ce sujet, Abba sortait sur le porche du réfectoire et commençait à appeler au repas, non pas ses enfants qui vivaient dans l’aisance, mais ceux qui venaient chercher de l’aide au monastère, y demander l’aumône, ou qui avaient quitté le monastère à cause de leur alcoolisme. En voyant cela, je ne pouvais plus rappeler à l’ordre le Père Héliodore, car j’avais sous les yeux l’exemple de ce que Le véritable amour est supérieur à nos conceptions de l’ordre.

«Nous croyons que la Très Sainte Mère de Dieu a pris le Père Héliodore sous Sa protection»

Qu’ajouter à ces histoires relatives au Père Héliodore? Peut-être ces paroles des frères du Désert d’Optino :
«Toutes les dates significatives dans la biographie du Hiérodiacre Héliodore sont liées aux fêtes de la Très Sainte Vierge. Et même lorsqu’il quitta ce monde, le Père Héliodore le fit le jour de la fête de l’icône de la Très Sainte Mère de Dieu d’Iviron, et le quarantième jour après sa mort tomba lors la fête principale du monastère : l’Entrée au Temple de la Très Sainte Mère de Dieu et Toujours Vierge Marie. Nous croyons que la Reine des Cieux a pris sous sa protection ce moine qui consacra sa vie sans relâche au service de Dieu et de son prochain.» Amen.

Traduit du russe

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