Saint Mardaire. L’immortalité de l’âme humaine et le songe de Lomonossov.

Le texte ci-dessous est un «entretien» accordé par le Saint hiérarque Mardaire Ouskokovitch (1889-1935) le 8 février 1910 à la Métropole de Chisinau, et publié le 05 mars 2021 sur le site Pravoslavie.ru.Saint Mardaire est un Saint de l’Église Orthodoxe de Serbie, glorifié, en présence du Patriarche Irénée en juillet 2017 aux États-Unis, où il a terminé sa vie. Il vécut de 1912 à 1917 à Saint Pétersbourg – Petrograd, et en 1917, il fut nommé dirigeant de la Mission Serbe en Amérique.

Aucune autre question n’a tant troublé l’esprit de l’homme depuis le début de son existence que la question de l’immortalité de l’âme, de la vie outre-tombe. Avant de procéder au déballage de cette question, il faut dire que même à l’époque actuelle, elle s’avère être une des plus pressantes, et sa difficulté est admise par les plus grands philosophes et penseurs. Mais nous serons guidés non seulement par notre raison, mais surtout par l’Écriture Sainte.
Je sais qu’en choisissant aujourd’hui pareille question comme sujet de conversation avec vous, je vais faire face aux préjugés et aux différents enseignements actuels et je vais devoir aller à contre-courant des philosophes modernes.
Depuis le début de l’existence du Christianisme, aucune époque n’a été moins imprégnée que la nôtre du sens de l’éternité. Les pensées des générations modernes qui nous entourent, sont dirigées vers les événements de l’heure actuelle, vers le domaine du monde visible. La question qui fait l’objet de la conversation d’aujourd’hui, à première vue, ne représente rien de réel, de concret. Cette vision de la chose m’embarrasse un peu, en quelque sorte on laisse tomber les bras, on sent l’inconsistance de nos connaissances théologiques et philosophiques, et on paraît prêt à descendre de cette haute chaire ecclésiastique muet, en silence mais sans perdre d’énergie. La religion chrétienne concerne l’âme de l’homme et non les goûts de l’époque, des individus ou des écoles, des tendances ou des directions. Le Christianisme est établi sur une base solide, dont les fondements sont inébranlables, et il ne cherche pas un appui dans les pensées dominantes du jour, il le cherche et le trouve dans les souffrances et les aspirations constantes de l’humanité. La vie du siècle à venir a été niée par beaucoup à toutes les époques, elle est niée par beaucoup à notre époque. Certains approchent du cercueil du défunt pour prendre son corps comme une chose inutile et même nuisible et l’enterrer au cimetière. Aucune prière ne sort de leur bouche, aucune parole divine n’éclaire leurs chagrins, mais à quoi serviraient les prières et les paroles divines quand ils ne croient pas en Dieu et dans l’au-delà? D’autres, les croyants, accompagnent le défunt avec l’espoir de se rencontrer dans le monde d’outre-tombe. Les uns se disent : « mangeons et buvons, car demain nous mourrons»(1Cor.15;32) et si parfois ils admettent la vie du siècle à venir, ils le font par matérialisme pratique. D’autre œuvrent avec crainte et tremblement à leur salut. Les affirment qu’avec la mort, tout se termine pour l’homme. Selon leur propre opinion, il n’y a pas d’âme en l’homme, et ce que nous appelons âme meurt avec l’homme selon eux. C’est ce que prétendent seulement qui nient l’existence de Dieu en même temps que l’âme. Le principal trait de caractère de ces gens, est l’insouciance : ils vivent, ne réfléchissant à rien, pour eux rien ne les intéresse dans le domaine supérieur, spirituel. La plupart du temps ils vivent une vie déréglée, visant une seule chose : comment vivre plus facilement, plus confortablement, avec plus d’amusement ; la vie les satisferait alors, même si elle serait remplie de mensonges, d’injustice, de saleté et de malice. Voilà pourquoi l’existence de Dieu et celle de l’âme sont pour eux un phénomène désagréable. Cela empêcherait leur grande vie de s’écouler comme elle s’écoule. Voilà pourquoi ils nient Dieu et l’âme. Ils savent qu’il faut répondre de l’iniquité, alors, ils se rassurent en disant que Dieu n’existe pas, et qu’il n’y a pas d’âme immortelle. Pareille vision de Dieu et de l’âme flatte leur nature pécheresse et corrompue, un tel regard leur donne le courage de manger, de boire et de s’amuser, car, selon eux, demain ils mourront de toute façon, et là, derrière le cercueil, il n’y a pas de vie, il n’y a pas d’âme et personne à qui rendre compte des actes commis.
Mais laissons-les dire et affirmer tout cela. Nous savons que l’âme est, et qu’elle est immortelle. Cela nous est confirmé par les Saintes Écritures. Dans le livre de l’Ecclésiaste dans l’Ancien Testament, il est dit: «L’homme s’en va dans sa maison éternelle (c’est-à-dire après la mort corporelle)… et en poussière (c’est-à-dire le corps) il retournera à la terre. Qu’il était. Mais l’esprit retournera à Dieu qui l’a donné» (Eccl. 12;5,7). Il en est de même dans le livre de la Sagesse: «Les Justes vivent pour toujours; leur récompense est dans le Seigneur et leur garde est auprès du Très-Haut»(Sag.5;15).
Tous les justes de l’Ancien Testament croyaient à l’immortalité de l’âme humaine (donc à l’au-delà). Mais l’immortalité de l’âme humaine est particulièrement claire dans le Nouveau Testament. Il est dit explicitement: «ne craignez pas ceux qui tuent le corps, mais ne peuvent pas tuer l’âme; mais craignez plus celui qui peut faire chuter l’âme et le corps dans la géhenne» (Mth. 10;28). «Dieu n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants» (Mth.22;32). Ceux des chrétiens qui sont morts et qui ont atteint la résurrection des morts ne peuvent plus mourir, car ils sont égaux aux anges (Lc.20;35–36). Voilà pourquoi notre Seigneur Jésus Christ a souvent dit et répété à Ses disciples et à ceux qui Le suivaient : «Ne vous amassez pas des trésors sur la terre, où la rouille et les vers rongent, et où les voleurs percent les murs et dérobent. Mais amassez-vous des trésors dans le ciel, où ni les vers ni la rouille ne rongent, et où les voleurs ne percent pas les murs ni ne dérobent» (Mth.6;19-20). Ou lisez le vingt-cinquième chapitre de l’Évangile selon Saint Matthieu à propos des vierges, cinq sages et cinq folles, comment Il met en garde ceux qui le suivent afin qu’avec les mèches brûlantes ils achètent de l’huile pour que les lampes ne s’éteignent pas et que l’Époux surviennent à ce moment. C’est le moment du Jugement Dernier qui est révélé ici. S’il n’y avait ps de vie outre-tombe et, de même, si l’âme de l’homme n’était pas immortelle, alors pourquoi le Christ Sauveur aurait-Il prévenu Ses disciples du Jugement qui vient?
En plus des paroles des Écritures de l’Ancien et du Nouveau Testament au sujet de l’immortalité de l’âme humaine, la relation des âmes des morts avec les personnes vivantes nous en convainc également. Cette relation exista toujours pendant tout le temps de l’Ancien et du Nouveau Testament. On peut s’en assurer à la lecture de la vie de Moïse, du Roi Saul, du Prophète Samuel et d’autres encore. Mais nous ne choisirons pas d’exemples vétérotestamentaires. Nous prendrons un exemple du passé relativement récent. Voici deux cents ans, naquit en Russie un savant célèbre, Mikhaïl Vassilievitch Lomonossov. Alors que celui-ci naviguait de Hollande vers la Russie, il fit le rêve suivant, sur le bateau. A son regard s’offrait une mer glaciale infinie, dans laquelle il nageait souvent dans son enfance. Et sur la mer, il a remarqué une embarcation et son père, un pêcheur, assis dedans. Le vent fort et la tempête se sont levés, les vagues de la mer s’apprêtaient à engloutir son père bien-aimé. Lomonossov voulut se précipiter vers son père pour l’aider, mais ses bras s’engourdirent. L’embarcation, s’écrasant sur les côtes près d’une île rocheuse, éclata en morceaux. Lomonossov vit un scène terrible et effroyable. Son père luttait contre les vagues géantes de la mer cruelle.

Songe de Lomonossov

Après avoir coulé dans l’eau pendant une minute, il réapparut à la surface de l’eau et cria: «Mikhailo!», mais bientôt il fut de nouveau recouvert par les vagues et disparut de la vue de Mikhail Lomonossov, son fils. Quelques minutes plus tard le corps fut rejeté à terre. Lomonossov se réveilla alors. Le rêve qu’il venait de faire le rendit très inquiet et il décida en son âme que son père s’était vraiment noyé dans la mer et, rejeté par les vagues sur le rivage, gisait sans sépulture. A l’arrivée à Saint-Pétersbourg, de laborieuses recherches lui permirent de trouver la trace de gens originaires de sa région et il s’enquit du sort de son père. Ces gens lui racontèrent qu’au début du printemps, son père et ses camarades avaient pris la mer, mais que depuis lors, on n’avait toujours aucune nouvelle d’eux. Incapable d’apaiser le tourment de son âme, Lomonossov voulut se rendre sur l’île qu’il avait vue dans son rêve, et qu’il connaissait depuis son enfance, mais il n’eut pas l’autorisation de quitter Saint-Pétersbourg. Il demanda alors à des pêcheurs locaux de se rendre dans l’île, et s’ils y trouvaient le corps de son père, de lui donner une sépulture. Et effectivement, à l’endroit que leur avait décrit Lomonossov, les pêcheurs trouvèrent le corps de son père et l’enterrèrent. Ne ressort-il pas clairement de tout cela que l’âme du père apparut en rêve au fils, pour lui faire part de la noyade qui précéda sa mort et du désespoir post-mortel dans lequel il se trouvait sans sépulture pour son corps et sans prière? Le célèbre Mikhaïl Vassilievitch Lomonossov lui-même y croyait. (A suivre)

Traduit du russe

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Le sens de l’éternité

Le texte ci-dessous est la traduction d’un original russe, homélie prononcée le 18 février 2023, samedi de tous les défunts, par le Hiéromoine Pavel Shcherbatchev au Monastère Sretenski à Moscou. Il y aborde des aspects fondamentaux de notre vie de Chrétiens, aspects que notre époque et le monde dans lequel nous vivons voudraient à tout prix effacer. Mais, comme le hiéromoine le rappelle, ces aspects sont au cœur de la vie en Christ. Et ils méritent d’être soulignés et intégrés pleinement. Le texte original a été publié sur le site du Monastère Sretenski de Moscou.

Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit!
Aujourd’hui, nous célébrons un office particulier. L’Église a choisi ce jour non pas seulement pour commémorer les proches qui reposent en paix, mais tous les chrétiens orthodoxes qui se sont endormis 1 depuis tous les siècles. Les frontières entre le monde des vivants et le monde des morts sont tracées d’une certaine manière dans les Évangiles. Que savons-nous de ces frontières?

(Photo provenant du site du Monastère Sretenski)

Vous souvenez-vous de la parabole de Lazare et de l’homme riche? Que dit l’homme riche à Abraham, qu’il voyait après être mort? Dans les tourments, il demanda à Abraham non seulement de le soulager lui-même, mais aussi les membres de sa famille : «Je te prie donc, père, d’envoyer Lazare dans la maison de mon père» (Lc.16;27). Il demande à Abraham de les prévenir du sort terrible qui fut le sien afin qu’ils n’arrivent pas eux aussi dans ce lieu de tourments. Abraham répond qu’ils ont Moïse et les prophètes et «S’ils n’écoutent pas Moïse et les prophètes, quelqu’un des morts ressusciterait, qu’ils ne le croiraient point»(Lc.16;31). Nous voyons donc dans ce récit de l’Évangile qu’il existe aussi une frontière entre le monde des justes et le monde des pécheurs qui ont franchi le seuil de l’éternité. Et Abraham dit encore à l’homme riche et pécheur que la limite est grande, marquée par : «un grand abîme entre vous et nous».
Quelle est donc notre lien avec ceux qui se sont endormis dans le Seigneur? Et que pouvons-nous dire de ce lien? Tout d’abord, comme nous le savons, ce lien s’effectue à travers la prière. Nous demandons au Sauveur Ressuscité d’accorder le repos aux membres de notre famille et à nos connaissances. Nous appartenons tous à la même armée de Chrétiens Orthodoxes, tous nous sommes citoyens d’un même pays et ce pays, c’est l’Église des Cieux. Et l’Église sur terre forme avec l’Église des Cieux, appelée aussi Église Triomphante, le Corps un du Christ. Par Sa résurrection, le Sauveur nous a tous unis dans notre Patrie Céleste. Mais comment vivons-nous? Cela vaut la peine d’y réfléchir.
Il est probable que la façon dont nous communiquons avec ceux que nous aimons dépend de l’attention que nous accordons à la révélation de l’Ancien Testament donnée aux gens dans la parabole racontée par le Sauveur. Elle dépend de notre écoute attentive des paroles de l’Évangile. Et il est aussi probable que notre relation avec eux et notre capacité à les aider par nos prières et nos bonnes actions dépendent non seulement de l’attention que nous accordons à ces commandements de l’Évangile, mais aussi de notre manière de les accomplir. Et si nous ne les accomplissons pas, alors même si voyons de grands miracles, même si l’un d’entre les morts nous apparaît, cela ne suscitera aucune foi particulière. L’homme qui vit comme un païen perd ce sentiment que rien ne remplace, celui de l’éternité.
Il existe des moyens qui visent à donner à l’homme un succédané de ce sentiment, une pseudo-éternité. Cela se produit en partie par une chute intégrale dans l’état animal, quand l’homme n’a besoin de rien, qu’il mange, boit et pense que tout est normal, comme chez les autres. Mais parfois, et ceci est caractéristique de notre époque, c’est lié à un pseudo-monde. L’homme se perd dans l’internet et oublie non seulement l’existence de l’éternité mais aussi ce qui existe autour de lui. Parfois de jeunes gens arrivent, parfois des moins jeunes aussi, avec un vide total dans leurs yeux. Vous demandez, «Eh bien, mon cher, ou ma chère, qu’est-ce qui t’est arrivé?». Alors, il ou elle répond : «Je suis tombé dans un réseau terrible». «Quel réseau, un réseau criminel?» «Non, je suis tombé dans le réseau invisible de l’internet. Je ne peux plus vivre sans lui, je vis dans un autre monde». Mais ce mal n’est pas arrivé spontanément. Il est apparu d’abord dans la civilisation occidentale, qui fait tout pour détourner l’homme de la mort et même pour le forcer à l’oublier complètement. Le souvenir de la mort, c’est une sorte de bombe à retardement, un champ de mine pour l’idéologie libérale moderne qui est inoculée sur tous les fronts dans les cœurs et les esprits de tous ceux qui vivent sur terre. Pourquoi d’aucun agissent-ils à l’instigation du vieil ennemi de l’homme pour que les gens oublient la mort? Parce que dans la conscience de chaque homme, on ne peut par aucune manipulation des cerveaux ni de l’environnement humain, forcer l’homme à oublier le problème bouillonnant qui frappe continuellement à la porte de son cœur : «Pourquoi cette vie qui aura un terme m’a-t-elle été donnée? Pourquoi ne me suis-je pas donné vie à moi-même? Cela ne dépend pas du tout de moi!» Comme nous nous en souvenons, cette question fut posée par le héros du roman de Dostoïevski «L’Idiot». Aucune idéologie, aucune technologie de contrôle des consciences ne peut répondre à cette question. Seule la religion le peut. Pourquoi? Parce que l’idéologie est destinée aux masses, aux classes sociales, à l’électorat, alors que la religion s’adresse au cœur, non pas des masses ou des classes, mais de chaque homme individuellement, qu’elle considère comme un grand trésor, d’une valeur inestimable pour le Seigneur Dieu.

(Photo provenant du site du Monastère Sretenski)

Pour nous (…), cette question est aussi d’actualité. Nous regardons ce qui se passe autour de nous et nous pensons : «Mais comment cela se fait? Pourquoi tout ne se passe-t-il pas comme nous le voudrions? Pourquoi Dieu n’agit-Il pas avec puissance, puisqu’il est Tout-Puissant et plein d’amour pour l’homme?». Et parfois nous oublions que, nous trouvant là où nous sommes, une grande foule de saints nous entoure(…) mais nous adressons-nous à eux? Demandons-nous toujours l’aide de nos saints, demandons-nous toujours à nos saints d’intercéder devant le Trône de Dieu pour l’allègement du sort de nos connaissances et de nos parents qui se sont endormis?
«Le dernier ennemi qui sera détruit, c’est la mort» (1Cor.15;26), dit l’Apôtre Paul dans son épître. Et dans l’Ancien Testament, le sage entre les sages, le Roi Salomon dit, dans le livre de la sagesse de Salomon : «Dieu n’a pas créé la mort et Il ne se réjouit pas de la mort des vivants. Il a tout créé pour la vie et tout dans le monde est salvateur» (Sag.1;13-4). Comment la mort est-elle entrée dans le monde? Pourquoi avons-nous subi tant de malheurs? Nous savons par les paroles de l’Apôtre Paul dans l’épître aux Romains que «…la mort est entrée dans le monde par le péché». Notre monde est toutefois, à côté de tout ce qui nous afflige, la révélation incessante de Dieu dans le cœur de chaque homme. C’est le cœur. Et le corps? Les Chrétiens croient en la résurrection du corps, un corps spirituel. Vraisemblablement, ce corps qui ressuscitera portera en lui tout ce qui était lié au corps. Sans corps, nous ne pouvons communiquer, faire de bonnes actions, accomplir des exploits spirituels. En cela, comme dans la nature du Christ Sauveur Lui-Même, le corps est lié au Divin et à l’humain. Le monde peut devenir corps, et c’est effrayant quand le monde se transforme en muscles, veines et os. Toutefois, nous sommes appelés par Dieu non seulement à nous relever dans un corps spirituel après la mort, mais aussi à devenir par notre vie des collaborateurs de Dieu prenant part à l’existence, à la communion spirituelle, à la résurrection et à la vie dans toute sa plénitude. Nous y sommes appelés pour que s’accomplisse la promesse que le Sauveur nous a donnée dans Son Évangile : «Je vous donne la vie, en abondance». Par les prières des saints dans l’entourage desquels nous vivons, par les prières de la Très Sainte Mère de Dieu, du monde des Anges, par la miséricorde de notre Dieu, que tout cela s’accomplisse dans la vie de chacun de nous et dans la vie de tous nos parents et connaissances qui se sont endormis, et qui par les prières de l’Église, que Dieu le veuille, hériteront de la vie éternelle et ressusciteront glorieusement dans un corps spirituel. Amen.

Traduit du russe

Source

 

Saint Païssios l’Athonite et les métanies.

A ce jour, trois volumes des Paroles de Saint Païssios l’Athonite ont été traduits en français. Alors que les six volumes en grec ont été traduits en russe depuis des années. Le texte ci-dessous est la traduction d’un extrait du volume VI De la Prière, dont la traduction russe a été publiée en 2021 aux Éditions Orthograph à Moscou. Le présent texte sera sans doute moins fidèle à la lettre de l’original grec que la traduction française officielle que nous attendons tous, mais malgré cela, les lecteurs francophones auront un avant-goût de ce que nous attendons tous et que la patience nous proposera dans plusieurs années peut-être, lors de la traduction de ce volume en français. Il s’agit d’un extrait du chapitre 4, intitulé «Venez, adorons,…», pages 79 et 80 de l’édition russe.

– Geronda, sans doute avez-vous mal aux jambes ?
– Non, je n’ai pas mal. Moi, je fais ma gymnastique spirituelle!
– A quoi faites-vous allusion, Geronda?
– Je fais des métanies, âme bénie! Comment l’homme s’en sortirait-il sans gymnastique? Dans le monde, ceux qui font de la culture physique se font ainsi un corps sain, et les moines, à l’aide des métanies se font un corps et une âme de vaillant guerrier. Les pauvres laïcs ne peuvent même imaginer combien les métanies sont utiles, non seulement pour la santé spirituelle, mais aussi pour la santé physique. Les métanies ne empêchent le développement des maladies articulaires, elles éliminent la mollesse, elles effacent les ventres pendants, elles remettent en ordre le système nerveux et de façon générale rendent l’homme robuste. De plus, elles lui donnent la possibilité de s’élever vers les hauteurs des vertus avec facilité, sans essoufflement, tout comme l’homme entraîné grimpe jusqu’au sommet de la montagne. Les métanies sont nécessaires aux jeunes comme aux vieux. A celui qui souffre d’attaques charnelles aussi bien qu’à celui qui s’est déjà libéré de celles-ci. Mais ceux qui sont les plus costauds doivent en faire plus que les faibles, tout comme on donne des tâches plus lourdes aux machines les plus puissantes. Les métanies sont particulièrement utiles aux jeunes pour brider le corps. C’est pourquoi je conseille toujours aux jeunes : «Faites autant de métanies que possible, pour vous, pour tous les malades et les gens âgés, qui n’ont plus la force de faire des métanies». Les métanies, c’est une prière. Mais en même temps, ce sont des exercices spirituels plus avantageux que n’importe quels autres occupations spirituelles. Non seulement les métanies aident à lancer notre moteur spirituel qui commence alors à produire la prière, mais elle offrent beaucoup d’autres avantages.Tout d’abord, quand nous faisons des métanies, nous nous prosternons devant Dieu Lui-Même et nous Lui demandons humblement Sa miséricorde, et cela, c’est l’essentiel. Deuxièmement, les métanies humilient notre corps débridé. Le calme s’y installe, et l’impassibilité charnelle. Et troisièmement, les métanies apportent aussi la santé du corps. Et donc, l’homme se fait une âme et un corps en meilleure santé, comme les guerriers doublement vaillants.
– Geronda, il m’est pénible de faire des métanies. Oh comme cela me déplaît…
– Pendant que tu fais des métanies, pense que tu te trouves devant Dieu Lui-Même, et que tu te prosternes devant Lui. Cette pensée t’aidera à les aimer. (…)
Traduit du russe

Source :  Преподобный Паисий Святогорец «Слова. Том VI. О молитве». Издательство:Орфограф, Москва. Pp. 79-80

Métropolite Néophytos de Morfou.Saint Païssios l’Athonite et Saint Isaac le Syrien. (5)

MNMoLe texte ci-dessous est la traduction d’une version russe mise en ligne le neuf février 2023 sur le site du Monastère Sretenie de Moscou, sous le titre :ПРЕПОДОБНЫЙ СТАРЕЦ ПАИСИЙ СВЯТОГОРЕЦ. ЧАСТЬ 3 Митрополит Морфский Неофит (Масурас). Dans ce texte, suite de la transcription d’une vidéo, le Métropolite Néophytos de Morfou décrit l’attitude  du Saint Geronda Païssios envers Saint Isaac le Syrien.

Aujourd’hui, je veux présenter à votre amour un saint que Saint Païssios l’Athonite notre contemporain qualifiait de «saint le plus éludé de l’Église». Je veux parler du héros de l’ascèse qui vécut au VIIe siècle en Mésopotamie, Saint Isaac le Syrien. C’était un ascète et il a légué ses «recherches doctorales» en matière d’ascèse, si je puis m’exprimer ainsi, à tous les Chrétiens orthodoxes qui mènent leur podvig.
Rien ne surpasse l’œuvre de Saint Isaac le Syrien, et sa lecture est recommandée indépendamment du niveau et de l’état spirituel du lecteur. Saint Païssios, qui l’aimait beaucoup, m’a dit, ainsi qu’à beaucoup de ceux qui vinrent le voir : «La valeur du livre de Saint Isaac le Syrien «Discours Ascétiques» est égale à celle de dix bibliothèques remplies des livres des Saints Pères».
Ce livre fut rédigé en langue syriaque. Deux moines du Monastère Saint Sabbas le Sanctifié, en Palestine, qui maîtrisaient les langues syriaque et grecque, l’ont traduit en grec. Depuis lors, le livre n’a pas cessé d’être traduit dans toutes les langues du monde, même en japonais.
Saint Païssios m’a dit personnellement :
– Parmi tes nombreux défaut, il en est un bien évident : tu es un rat de bibliothèque. Ce n’est pas une très bonne chose. Tu ne laisses pas suffisamment de temps à ton esprit pour la prière. Tu préfères toujours lire. Plus tard, cela posera un problème. Maintenant tu n’es pas en mesure de comprendre cela, et même, tu considères cela comme un avantage.
Il dit encore:
– Mon fils, les livres des Saints Pères, il faut les lire petit à petit, mais chaque jour que Dieu fait. Quand je dis «petit à petit, cela signifie deux chapitres du Saint Évangile, trois cathismes du psautier et deux pages de Saint Isaac!
Dans la cellule de Saint Païssios, il y avait une icône en papier. Pas du genre de celles, «aristocratiques», qu’il y a chez nous… Sur cette icône Saint Isaac était représenté écrivant à la plume ses «Discours Ascétiques». Il se tourna vers elle et dit :
– Mon Saint Isaac, j’aime annoter les livres, donne-moi ta plume pour que je puisse souligner tout ton livre! Toutes les paroles qu’il contient sont d’une valeur inestimable, tout ce qui y est écrit porte la lumière du Christ! Donne-moi ta plume pour que je souligne tout dans ton livre.
Non seulement il exprima cette pensée, mais il l’écrivit dans un livre, si bien qu’aujourd’hui, il existe un livre, qu’il lisait et dans lesquels étaient écrites ses propres paroles : «Mon Saint, donne-moi ta plume, pour que je souligne tout ton livre». Voilà la valeur que ce livre avait pour son âme. Et il me dit encore :
– Où que tu ailles, quoi que tu fasses, sur ta table de travail un livre doit être ouvert, celui de Saint Isaac le Syrien. Ne le termine jamais (il voulait dire terminer la lecture des enseignements contenus dans le livre), quel que soit le nombre de tes années.
Et si vous visitez mon cabinet de travail, même si tous les autres livres sont fermés, vous verrez que Saint Isaac est toujours ouvert. Saint Païssios m’a également dit ceci :
– Lis petit à petit, le livre contient tellement de «vitamines» que tu ne dois pas lire et ingurgiter plus de deux pages. Et quand tu reviens me voir, ne me dis jamais que tu as fini la lecture de Saint Isaac. Il n’y a pas de fin à la perfection. Et Saint Isaac est l’un des saints les plus parfaits, les plus grands!
Voilà pourquoi chaque jour je lis une où deux pages, sur lesquelles je souligne l’essentiel. Un jour, je fus tellement bouleversé par ce que j’avais lu que je me souvint de la plume. Je m’écriai alors :
– Saint Isaac, Saint Païssios avait raison! Chacune de tes paroles vaut de l’or et doit être soulignée! Geronda Païssios, envoie-moi une plume, que je puisse souligner tout le livre.
Quelques jours plus tard, un de mes fils spirituels, Vassilis, de Thessalonique, est arrivé à la métropole. Dans mon bureau, il me dit :
– Despotes, je vous ai apporté un cadeau, mais je ne sais trop s’il vous plaira. Pour autant que je sache, vous ne cessez jamais de lire, alors j’ai pensé vous offrir un cadeau que les érudits et les savants de jadis tenaient toujours à la main.
Je pensais que, sans doute, il m’avait apporté un Parker… J’ouvris la boîte et que pensez-vous qu’elle contenait? Une plume! Alors, je dis :
– Seigneur prends pitié! Les Saints écoutent même nos plaisanteries!
Dans un livre que nous avons édité à la métropole, j’ai inséré une photo de cette plume. Et j’ai ajouté en légende sous la photo : «Cette plume fut donnée par Saint Païssios pour souligner les pensées ascétiques de notre bien-aimé Isaac le Syrien».
J’aimerais parler de ce que Geronda Païssios disait, semble-t-il, de Saint Isaac que celui-ci était le «saint le plus éludé». Dans le synaxaire et les livres liturgiques, on ne dit rien à son sujet. Certains moines dévots, bien au fait des ses écrits ascétiques et théologico-thérapeutiques, le commémoraient en même temps qu’un autre grand Syrien, Saint Ephrem le Syrien, dont la mémoire est célébrée le 10 février. Ces moines ajoutaient «Ainsi que notre Père saint et théophore, Saint Isaac le Syrien». Il n’y a pas de tropaire le concernant, ni de kondakion, ni de mégalinaire, ni d’office.
D’où provient une telle injustice? Elle vient du fait que certains accusent Saint Isaac de nestorianisme, car il vivait en Mésopotamie parmi les hérétiques nestoriens. A cause de cela, il fut tenu longtemps à l’écart du chœur des saints. Voyez comme étaient durs les Byzantins… Passèrent les années et les siècles et Saint Isaac demeurait un saint exclu , commémoré nulle part, sans gloire, «éludé».
Notre Saint Geronda Païssios avait un don. Il avait un «téléviseur» dans lequel il pouvait voir dans la vie céleste et terrestre, comme tous les grands saints. Et un jour alors que Geronda était au monastère, il entendit un moine énoncer des propos contre Saint Isaac :
– C’est un livre tellement remarquable! Mais ce saint était un hérétique, il était dans l’erreur…
Geronda ne dit rien, mais fut attristé. Il racontait :
– Je rentrais dans ma cellule. J’étais affligé par ces paroles au sujet de Saint Isaac. Dans chaque verset de ce livre, je sentais la grandeur de ce saint. D’un autre côté, j’étais décontenancé. Comment n’avait-on composé aucun tropaire pour lui? Il y a tellement de neomartyrs, et chacun d’eux a son tropaire… Quelque chose clochait dans sa vie?
Ainsi, un petit doute survint en Geronda. Alors qu’il entretenait ces pensées, montant vers sa cellule, un grand «écran» lui apparut sur le bord du chemin. Devant Geronda les saints commencèrent à se manifester… Quel tableau! D’abord, Saint Antoine, ensuite, Saint Pacôme, Saint Hilarion… Tous passaient devant lui. Il leur faisait des métanies et eux le bénissaient. A un certain moment, Saint Isaac apparut à côté de lui. Il s’arrêta et dit :
– Père Païssios ne t’attriste pas. Oui j’ai entendu ces paroles… Père, j’ai vécu en Mésopotamie au milieu des hérétiques nestoriens, mais jamais je n’ai célébré la liturgie avec eux. Que du contraire, j’ai essayé de les amener à la foi orthodoxe. Tu peux vénérer mon icône et écrire mon office.
Le lendemain, Saint Païssios se mit en route à la hâte. Et où alla-t-il, selon vous? Auprès de l’hymnographe Gérasime à la Skite de la Petite Sainte Anne. Il parla avec larmes au vertueux Père Gérasime de sa vision, et le Père Gérasime composa l’office de Saint Isaac que chantent aujourd’hui nos chantres.
Ainsi un saint identifia un autre saint. Et il est important de vénérer nos saints, particulièrement les grands !
Traduit du russe
Source

Métropolite Néophytos de Morfou. Comment je voyais Saint Païssios l’Athonite. (4)

MNMoLe texte ci-dessous est la traduction d’une version russe mise en ligne le cinq février 2023 sur le site du Monastère Sretenie de Moscou, sous le titre :ПРЕПОДОБНЫЙ СТАРЕЦ ПАИСИЙ СВЯТОГОРЕЦ. ЧАСТЬ 2 Митрополит Морфский Неофит (Масурас). Dans ce texte, transcription d’une vidéo, le Métropolite Néophytos de Morfou illustre certains traits particuliers du Saint Geronda Païssios.

Saint Païssios reçut la visite non seulement de la Très Sainte Vierge Marie, mais aussi de nombreux saints. On connaît l’apparition de Saint Euphémie au Geronda Païssios. Une nuit, soudain, racontait Saint Païssios, ou plutôt, au petit matin, alors qu’il priait, on frappa à sa porte. Il demanda :

Sainte Euphémie

– Qui est là?
– C’est moi, Euphémie, répondit une voix féminine.
– Qui?
– Euphémie!
Avant que la porte ne s’ouvrit complètement, la sainte l’avait traversée. Geronda Païssios, hardi, ne se troubla pas.
– Qui es-tu, Euphémie, et comment te trouves-tu sur la Sainte Montagne de l’Athos ?
– Je suis la martyre Euphémie, Père Païssios! Lui répondit-elle.
– Si tu es la martyre Euphémie, va dans la chapelle, fais trois métanies, signe-toi du signe de la Croix à trois reprises, et puis reviens, alors nous discuterons!
Il se montra prudent, craignant que cette apparition fût une illusion diabolique. La Sainte entra dans la chapelle de la cellule et fit trois métanies. Il lui dit
– Au nom du Père…
La Sainte avait une voix faible.
– Au nom du Père, répéta Sainte Euphémie.
– Plus fort, je ne t’entends pas!
Et quand le Saint Geronda vit qu’elle se signait, il se mit à genoux et lui dit :
– Pardonnez-moi, mais parfois, semblables apparitions proviennent du tentateur!
Vous voyez, Saint Païssios ne cherchait pas les miracles. Même quand dans sa vie un miracle se produisait, il le vérifiait.
L’amour de Saint Païssios pour Chypre était inhabituel. Je vais vous raconter ce qui s’est produit voici peu. A Limassol, on construisait une grande église, consacrée à Saint Arsène et Saint Païssios. Le Métropolite Athanasios de Limassol me téléphona et demanda :
– Accepteriez-vous de venir afin que nous célébrions ensemble la consécration de l’église?
– Écoutez, Athanasios, vous souffrez des jambes. Les médecins veulent vous opérer! Moi aussi, je souffre des jambes car je manque de vitamines B12. Nous sommes deux évêques boiteux! Consacrez l’église, mais moi, je ne peux venir.
Je n’y allai donc pas. Mais je pensais souvent à la consécration de cette l’église. Je reçus un appel téléphonique d’un homme à l’âme toute pure, un habitant de Kapsalos, un de ces hommes dont la prière maintient notre pays en vie et libre. Il s’appelle Andreas. Il me dit :
– Aujourd’hui, il y a eu un miracle pas loin d’où je vis. Je n’arrête pas de téléphoner à Limassol, mais personne ne décroche, donc je vous téléphone pour vous raconter le miracle.
– Que s’est-il passé, Andreas?
– En 1993, un an avant la mort de Saint Païssios, je suis allé le voir. C’était la seule fois que j’y suis allé. Deux hommes de Limassol m’accompagnaient. Geronda me demanda :
– Tu t’appelles comment, mon enfant?
– Andreas.
– Tu fais quoi?
– Je suis entrepreneur.
Alors, un des deux hommes de Limassol dit à Geronda Païssios :
– Geronda, il ne vous dit pas la vérité. Il est entrepreneur, mais savez-vous ce qu’il fait? Il détruit les grands bâtiments.
Geronda Païssios répliqua :
– Oui, il détruit, mais pour autant que je puisse en juger, il en construit aussi.
– Non, je n’en construit pas, je ne fais que les détruire, dit Andreas.
– Non, Andreas, tu en construis car tu développes ton obéissance envers ton père spirituel!
Andreas allait se confesser auprès du Père Athanasios, le supérieur du Monastère de Stavrovouni.
– Par cette obéissance, lui dit Geronda, tu construis progressivement un édifice que tu trouveras quand tu arriveras au paradis. Et sache que là où tu vis maintenant, je vivrai dans quelques temps.
– Mais je vis à Limassol, dans le quartier de Kapsalos. Vous allez venir à Kapsalos?
 -On va m’y construire une grande demeure. Elle se trouvera à 635 mètres de ta maison. Et ne t’inquiète pas au sujet de tes parents. Tu ne te marieras pas, et tu ne deviendras pas moine. Ni le monastère, ni le mariage ne te sont nécessaires. Reste dans le genre de vie dans lequel tu te trouves aujourd’hui!
– Geronda, j’ai peur de la solitude après la mort de mes parents!
– Ne pense pas à cela, lui dit Saint Païssios, je viendrai près de toi, de ma grande demeure qu’on me construira à Limassol, et je te tiendrai compagnie! Et chaque fois que tu seras indécis, viens me voir dans la grande demeure. Mais tu sais, tu ne resteras pas longtemps un réfugié, et je ne resterai pas longtemps dans la grande demeure. Car alors une grande miséricorde se produira! Tu viendra avec moi et nous partirons pour ton coin de terre natal (dans la partie occupée de Chypre). Là, les Turcs construiront un grand port. Nous prendrons le bateau et nous naviguerons jusqu’à la rive d’en face, à Farassa!
– Mais il n’y a pas de port dans ce coin-là.
– Aujourd’hui, il n’y en a pas, mais les Turcs en construiront un.
Si vous allez aujourd’hui au Monastère du Saint Apôtre André, vous verrez que les Turcs ont construit là un grand port pour les yachts, le plus grand de la Méditerranée orientale. Geronda Païssios avait prédit cela dès 1993.
Notre relation avec ces événement est significative. Saint Païssios y pensait. Il voyait que nous recherchons uniquement, de façon maniaque, les miracles, les prédictions et les décisions faciles. Et nous vivons de grandes difficultés dans notre attitude vis-à-vis de ces choses, dans la façon de compatir avec les gens. Et quand je parle de «gens», je ne parle pas seulement de nos Cypriotes orthodoxes, mais aussi des Turcs. Nous devons veiller à ce que lors de ces événements, qui seront provoqués par les hommes mais que Dieu utilisera pour le bien des hommes, nous vivions dans le repentir, dans la prière, avec beaucoup de compassion pour tous les gens. Voilà ce que nous devons faire à notre époque. Pendant la crise économique, nous devons partager avec nos proches notre nourriture, notre argent, et nos bonnes paroles. Ce qui se produit maintenant, c’est une répétition, un entrainement. De grands événements nous attendent. Je ne veux pas clôturer mon propos par des histoires de miracles et de prophéties dont nous pourrions bavarder pendant des heures sans que cela ne nous soit d’aucun profit. Je terminerai par quelques mots au sujet de ce que le Saint Geronda aimait. Vous vous demandez ce qu’il aimait, à part la Cappadoce, la Sainte Montagne, Souroti?
Il aimait les gens qui souffraient, qui s’asseyaient et qui attendaient qu’il vienne et écoute leurs souffrances pendant des heures. Et en réalité, je crois qu’aujourd’hui, il n’existe aucun autre geronda qui accueille autant de gens et écoute leurs problèmes. Et Geronda Païssios devenait une mère aimante pour tous ceux qui souffraient. Même lorsque des étrangers, par exemple des Allemands, demeuraient seuls avec lui et lui parlaient en Allemand, et que Geronda leur parlait en Grec, ils se comprenaient l’un l’autre. Ils parlaient la langue de la Pentecôte. C’est très important, mais pour moi, ce qui est le plus important, c’est l’amour de Saint Païssios envers un grand saint, Saint Isaac le Syrien, considéré par beaucoup comme un «docteur» en ascèse. Saint Païssios disait qu’un des problèmes de notre époque consistait en ce que nous, les gens d’aujourd’hui, nous nous satisfassions de la lecture de livres, de l’écoute d’entretiens, sans avoir le souhait de faire les efforts nécessaires à quelques métanies et quelques signes de croix pour nos voisins, et nous ne prions pas pour ceux qui nous offensent, nous ne disons pas : «Seigneur, fais miséricorde à celui qui m’a injustement accusé et a déjà remis son esprit à Dieu». Un jour, je lui demandai :
– Pourquoi est-ce que j’éprouve une joie immense quand je commémore les défunts?
– La plus belle prière est la prière pour les défunts car eux ne peuvent plus se repentir.
Et nous pouvons les aider. Saint Païssios disait que, malheureusement, aujourd’hui, il y a de plus en plus de livres et d’entretiens spirituels, mais de moins en moins d’expérience spirituelle vécue car les gens se trouvent sous l’influence de l’esprit de ce monde qui les incite à se donner constamment aux conforts et à fuir le labeur physique. La plupart d’entre nous trouvons consolation dans la lecture de livres orthodoxes, mais nous n’appliquons pas dans nos vies ce que nous avons lu. Nous nous enthousiasmons devant les saints héros de l’ascèse de notre Église, mais ne parvenons pas à comprendre combien ils ont travaillé, nous n’essayons pas de mener comme eux notre podvig avec philotimo et à les imiter. Ce qui sauve le Chrétien, ce ne sont pas les enseignement théoriques, mais l’accomplissement des commandements de Dieu. J’ajouterai une citation d’un livre de Saint Isaac le Syrien : Discours ascétiques . Saint Païssios lisait quotidiennement un extrait de ce livre. Un jour, il me dit :
– Chaque jour, je lis ce livre, mais pas plus de deux pages. Une page, c’est suffisant, maximum deux, pour que le cœur se mette à brûler.
Écoutez ce qui allume le feu dans le cœur de l’homme qui veut mener une vie ascétique :
«Mieux vaut vivre en compagnie des bêtes sauvages qu’avec les amis des vices. Mieux vaut se lier d’amitié avec un assassin qu’avec celui qui aime la discorde. Assieds-toi avec les lépreux, pas avec les orgueilleux. Sois crucifié, ne crucifie pas. Sois injustement calomnié et ne te justifie pas. Endure la calomnie et ne calomnie pas. Sois indulgent et n’envie pas le mal. Réjouis-toi avec celui qui se réjouit et pleure avec celui qui pleure. Pleure avec le pécheur. Réjouis-toi avec le repentant, sois l’ami de tout homme». (A suivre)
Traduit du russe
Source

Métropolite Néophytos de Morfou. Comment je voyais Saint Païssios l’Athonite. (3)

MNMoLe texte ci-dessous est la traduction d’une version russe mise en ligne le cinq février 2023 sur le site du Monastère Sretenie de Moscou, sous le titre :ПРЕПОДОБНЫЙ СТАРЕЦ ПАИСИЙ СВЯТОГОРЕЦ. ЧАСТЬ 2 Митрополит Морфский Неофит (Масурас). Dans ce texte, transcription d’une vidéo, le Métropolite Néophytos de Morfou illustre certains traits particuliers du Saint Geronda Païssios.

Saint Païssios répétait souvent qu’il est bon que nous entretenions une bienveillante inquiétude au sujet de notre âme, de notre famille, de notre patrie, de l’Orthodoxie, des musulmans, des croyants, des incroyants. Pourquoi disait-il cela? C’est mon interprétation personnelle, et je peux me tromper, mais je pense que c’était parce qu’il était un réfugié. J’ai déjà souligné que Saint Jacques (Tsalikis) en était un aussi. Un jour, Saint Jean le Russe apparut au Geronda Jacques et lui dit :
– Jacques, la guerre va arriver!
Et Geronda Jacques lui répondit :
– Saint homme qui plut à Dieu, nous ne voulons pas une guerre de plus!
– Une guerre doit se produire, sinon, le monde ne pourra se corriger! Jacques, ce n’est pas le Seigneur mais bien les hommes qui provoquent des guerres!
Saint Païssios a décrit ces événements en détail. Pourquoi? Parce qu’il ressentait une forte aspiration à la libération de notre pays asservi. Il est clair que Dieu, qui est Suprême Humilité, aide chaque saint dans ses aspirations les plus profondes. Le souhait le plus caché de Saint Païssios était de connaître profondément le monde entier et le Seigneur lui donna le don de clairvoyance, afin qu’il voie les étoiles, les planètes, l’univers, les eaux souterraines. Saint Païssios souhaitait sincèrement apprendre quand serait libérées sa terre natale d’Asie Mineure, et Chypre. C’est pourquoi le Seigneur lui donna le don de prévoir avec précision les événements futurs.
Très souvent, les gens ont déformés les propos de Saint Païssios, c’est pourquoi je souligne que nous, les Cypriotes qui avons enduré beaucoup d’épreuves, nous devons apprendre ceci : il ne faut pas essayer de savoir quand et comment se produiront tous ces événements importants qui naturellement nous inquiètent. La question est de savoir quelle doit être notre attitude envers eux. J’ai de plus en plus l’impression que Dieu nous prépare, mais à mon humble avis, ce serait bien que la meilleure des préparations aux événements qui se produiront et qui ont déjà commencé à se produire, ne consiste pas à remplir de provisions nos frigos, car un jour ou l’autre, ils se videront, mais à acquérir l’illumination. Dans les moments importants de sa vie, l’homme illuminé est capable de prendre des décisions rapides et justes. Mais pour être illuminés, nous devons en permanence purifier notre coeur et notre esprit par le repentir. Nous, les moines, nous annonçons que quoi que nous ayons fait, nous reviendrons vers le repentir personnel, non pas à une sorte de vague repentir de la société, mais au repentir personnel. Il est important de s’asseoir et de réfléchir. Quelles sont mes passions principales? Il faut les dénicher. Et si en moi se trouve tant d’égoïsme, tant de vanité que je ne parviens à trouver en moi aucune passion, il faut dire au Sauveur : «Mon Christ, montre-moi qui je suis!». Et Il nous montrera qui nous sommes. Quand l’homme apprend à se voir et à se repentir à certains moments de sa vie quotidienne, il entre dans le processus du repentir. Si nous n’apprenons pas à faire cela, notre prière sera mécanique et nous ignorerons ce qu’il faut faire dans les moments difficiles, quand nous devrons prendre des décisions, indépendamment du fait que cela concerne nos enfants, notre Patrie ou nous-mêmes.
Saint Païssios était un grand opposant de la sécularisation. Qu’entendons-nous par sécularisation? Précisément ce que nous vivons de nos jours, indépendamment du fait que nous soyons moines ou mariés. Geronda était inquiet du fait qu’aujourd’hui, la sécularisation apparaisse aussi dans les monastères. Il voyait cela même à la Sainte Montagne, où les supérieurs des monastères commençaient pour la première fois à construire des routes, à utiliser des téléphones et à admettre un mobilier coûteux dans les cellules. Voyant tout cela, Saint Païssios se demandait : «Mais où allons-nous?». J’introduis ici un exemple seulement. Il ne voulait pas que les moines fournissent des draps de lit aux pèlerins. Vous me demanderez : «Mais pourquoi?». Le Saint Geronda attachait de l’importance aux détails. Il disait :
– Qu’ils se couvrent d’une couverture, ainsi, ils ne voudront pas rester longtemps dans le saint monastère!
N’aimait-il pas les pèlerins, celui qui nuit et jour les accueillait et les écoutait? Tout simplement, il ne voulait pas que le Mont Athos et ses monastères se transforme en un lieu touristique. Aujourd’hui, nous les hiérarques, nous avons fait du tourisme religieux une science. Dans un monastère pour femmes de l’Attique vivaient des moniales, d’authentiques ascètes. Saint Païssios alla leur rendre visite et proposa de les prendre sous sa direction spirituelle. Mais un monastère pour femmes, c’est un monastère fleuri. A peine en eut-il franchi le portail que les moniales lui firent visiter les lieux, et lui, au passage, renversait et cassait les pots de fleurs. Derrière lui, la supérieure du monastère nettoyait les débris à l’aide d’une pelle. Mais il lui dit :
– Ne nettoie pas maintenant, je vais encore en casser beaucoup ! Si vous voulez vous placer sous ma direction spirituelle, je ne veux pas voir de pots de fleurs dans la cour.
N’aimait-il pas les fleurs? Lui qui souffrait pour une fourmi, et qui disait aux serpents :
– Eh bien, je vous donne du lait, mais ne restez pas ici, les pèlerins ont peur de vous!
Et elles obéirent au Saint Geronda. Mais en fait, qu’est-ce qui l’inquiétait? Le temps. Si nous avons quelque chose qui nous appartienne complètement, c’est le temps. Le temps est précieux. Saint Païssios était inquiet en voyant à quoi les chrétiens, les hiérarques, les prêtres et les moines occupaient leur temps. Et il dit aux moniales :
La présente de nombreux pots de fleurs signifie que celles-ci nous prennent beaucoup de temps pour les arroser! Et combien de gens ont besoin de vos prières aujourd’hui! Que les femmes mariées cultivent des fleurs en pots. Les moniales n’ont pas besoin de faire ça.
Lisez la prière d’une des supérieures du monastère, qui fut la meilleure disciple de Saint Païssios. Lisez quelle prière elle prononça sous l’influence et l’impression de l’ascétisme de ce grand saint Geronda. Celle qui lui succéda m’a envoyé cette prière :
…Accorde-moi, Mon Époux, une couverture, afin que personne ne me voie!
Envoie-moi dans un monastère que personne ne connaît!
Donne-moi la prière pure sans que je la comprenne!
Aide-moi à accomplir avec précision Ta volonté dans ma vie et à accepter ma mort comme l’expiation de mes nombreux péchés, comme témoignage de mon peu d’amour pour Toi, par l’intercession de la Très Sainte Mère de Dieu et les prières de mon geronda!
Si vous me demandez ce qu’est la sécularisation, je répondrai que c’est un puissant attachement aux biens de ce monde et la dépendance d’eux. Le contraire de la sécularisation, c’est l’Éternité. Tout ce qui est éternel n’est pas du monde. (A suivre)
Traduit du russe
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